I : Louis XVIII, de la révolution à la
restauration (1789 à 1815)
1° Les premières années de Louis
XVIII (1755 à 1789) –Louis Stanislas Xavier, futur Louis
XVIII, naquit à Versailles en novembre 1755. Ce dernier, septième enfant
du dauphin Louis Ferdinand[1]
(fils aîné de Louis XV.) n’était à l’origine pas destiné à régner.
Néanmoins, Louis Stanislas Xavier reçut une bonne éducation au château de
Versailles, puis fut titré comte de Provence.
Buste de Louis XVIII, par Achille VALOIS, 1814, musée du
Louvre, Paris.
En
1771, Louis Stanislas Xavier épousa
Marie Joséphine de Savoie[2].
Toutefois, le couple n’eut jamais d’enfants, le comte de Provence n’étant
pas attiré par son épouse ; par ailleurs, cette dernière était
vraisemblablement lesbienne.
Marie Joséphine de Savoie.
En
avril 1774, Louis XV mourut. Le trône aurait alors dû revenir à son fils
unique, Louis Ferdinand, mais ce dernier était décédé en décembre 1765 (son
épouse, Marie Josèphe de Saxe, était elle aussi morte en mars 1767.).
Ce fut alors Louis Auguste, troisième fils des défunts (les aînés du
couple, Louis Joseph Xavier et Xavier Marie Joseph, étaient
respectivement décédés en mars 1761 et février 1754.), qui monta sur le
trône sous le nom de Louis XVI.
Le
nouveau souverain, plus débonnaire qu’incompétent, inaugura son règne en
restaurant le Parlement de Paris, institution juridique chargée de
rendre la justice dans la capitale. Les parlementaires, dont les sièges se
transmettaient de père en fils[3],
avaient aussi des fonctions administratives, enregistrant les édits royaux
et disposant d’un droit de remontrance.
Tout au long de son règne, Louis XVI tenta de mettre en place des réformes
économiques, mais fut bloqué aussi bien par le Parlement de Paris que par la
noblesse, chaque parti refusant que l’on porte atteinte à ses privilèges.
2° Louis XVIII et la Révolution française (1789 à 1799) –
En 1789, Louis XVI décida de convoquer les Etats Généraux, afin
de passer outre les remontrances des parlementaires. Toutefois, cette
décision ne tarda gère à déclencher la
Révolution française[4].
Les députés du tiers état, après avoir affiché leur volonté de mettre en
place une constitution, furent bientôt rejoints par le clergé et la noblesse
au sein de l’Assemblée nationale. Promulguant de nombreuses réformes
(adoption du système métrique, création des départements, déclaration des
droits de l’homme, etc.), les députés mirent en place une monarchie
parlementaire, ce qui ne plut guère à de nombreux aristocrates.
Alors que bien des nobles avaient déjà émigré, le futur Louis XVIII décida
de quitter la France le 21 juin 1791. Alors que ce dernier franchissait la
frontière des Pays Bas autrichiens, son frère aîné Louis XVI n’avait pas la
même chance : en effet, ce dernier fut intercepté et ramené de force à
Paris.
Par la suite, le comte de Provence se réfugia à Coblence, capitale de
l’archevêché de Trèves[5].
A noter que cette cité était le point de ralliement de toute l’aristocratie
française émigrée.
En
août 1791, Louis Stanislas rencontra Frédéric Guillaume II, roi de
Prusse, et Léopold II[6],
Empereur germanique et archiduc d’Autriche. Les deux souverains décidèrent
alors de signer la déclaration de Pillnitz, manifestant leur
inquiétude vis-à-vis de la situation de Louis XVI.
Mais Léopold II n’était pas un belliciste, et mourut en mars 1792 sans rien
avoir tenté contre la France. Son successeur, le jeune François II
(il était le fils du défunt.), se montra rapidement menaçant. La France
décida alors de déclarer la guerre à l’Autriche en avril 1792.
François II,
château de Chantilly, Chantilly.
Le
roi de Prusse décida quant à lui de participer au conflit, et fut rapidement
rejoint par le comte de Provence, qui avait levé une petite armée.
Toutefois, Prussiens et royalistes furent vaincus en avril 1792 lors de la
bataille de Valmy[7].
Suite à cet échec, le futur Louis XVIII décida de se réfugier en Westphalie,
région bien plus éloignée des frontières françaises que l’archevêché de
Trèves. C’est de très loin que le comte de Provence assista à la déchéance
de Louis XVI (la république fut proclamée en septembre 1792.), puis à son
exécution capitale (21 janvier 1793[8].).
A
la mort de son frère aîné, Louis Stanislas se proclama régent au nom de son
neveu, le jeune Louis XVII. Toutefois, le petit garçon mourut en juin
1795, faisant du comte de Provence le nouveau roi de France[9]
(cette titulature restait purement nominale.).
En
France, la période de la Terreur, qui avait coûté la vie à près de
15 000 personnes, s’acheva en juillet 1794 avec l’exécution de Maximilien
de Robespierre. Les jacobins, partisans d’une politique intransigeante,
furent alors évincés du pouvoir et remplacés par des députés modérés.
Le
Directoire[10],
inauguré en 1795, ne parvint toutefois pas à sortir le pays de la crise qui
sévissait depuis le règne de Louis XVI. Le nouveau régime fut alors attaqué
aussi bien par les royalistes, qui voulaient mettre un terme à la
Révolution ; que par les jacobins, qui souhaitaient la poursuivre (à noter
que ces derniers, arrivés en tête des élections de juin 1799, furent
désormais majoritaires dans les assemblées.).
L’abbé Emmanuel Joseph Sieyès[11],
un des cinq directeurs, souhaitait mettre fin aux troubles qui agitaient le
pays depuis dix ans. Ce dernier se rapprocha alors de Napoléon Bonaparte,
un jeune général s’étant rendu célèbre pour ses victoires en Italie[12]
et en Egypte[13].
Le
10 novembre 1799 (19 brumaire an VIII.), les députés du Conseil des
Cinq-Cents et du Conseil des Anciens se réunirent à Saint Cloud.
Bonaparte, après avoir rendu visite aux deux chambres, parvint à faire
promulguer la création du Consulat, mettant ainsi un terme au
Directoire.
3° Louis XVIII et la période napoléonienne (1799 à 1815) –
Suite au coup d’Etat de Brumaire, Napoléon Bonaparte avait été nommé premier
consul. Louis XVIII, constatant les mesures d’apaisement mises en place par
le Consulat, décida alors d’envoyer un courrier à Napoléon. Le Bourbon
demanda alors à son interlocuteur d’être restauré sur le trône, en échange
de quoi Napoléon recevrait la charge de lieutenant-général du royaume (20
février 1800.).
Le
premier consul préféra toutefois refuser, envoyant sa réponse en fin d’année
1800.
En
1804, Louis XVIII et ses proches furent chassés de Prusse, le roi
Frédéric Guillaume III ayant passé un accord avec Napoléon (ce dernier
était entretemps devenu Empereur.). Le prétendant au trône de France se
tourna alors vers le tsar Alexandre I°, qui installa les émigrés à
Mittau, en Lettonie.
Vase à l'effigie de Frédéric Guillaume III, XIX° siècle, château de
Charlottenburg, Berlin.
Toutefois, vaincu par la France, le souverain russe fut rapidement contraint
de s’allier avec Napoléon. Suite à la signature du traité de Tilsit,
en juillet 1807, Louis XVIII fut invité à quitter Mittau. Le Bourbon et ses
proches décidèrent alors de se réfugier en Angleterre.
4° La première restauration (avril 1814 à mars 1815) –
Installé non loin de Londres, Louis XVIII rentra en France en avril 1814.
Heureux de retrouver un trône qu’il réclamait depuis juin 1795[14],
le nouveau souverain ne se montra guère intransigeant.
Entrée de Louis XVIII à
Paris, le 3 mai 1814, par Pierre Nicolas LEGRAND, musée Carnavalet,
Paris.
Ce
dernier, le 4 juin 1814, promulgua ainsi la Charte de 1814, texte de
compromis reconnaissant les acquis de la Révolution et de l’Empire.
Ainsi, plusieurs droits et libertés étaient reconnus (droit individuels,
droit de propriété, liberté de la presse, liberté d’expression, liberté
religieuse, etc.) ; par ailleurs, la vente des
biens nationaux[15]n’était pas remise en cause (seules les
parcelles invendues étaient rétrocédées à leur dernier propriétaire.) ;
l’ancienne noblesse était rétablie dans ses titres, et la noblesse d’Empire
conservait les siens.
Louis XVIII détenait le pouvoir exécutif (chef des armées, il avait le droit
de déclarer la guerre ou de faire la paix ; il gérait aussi la diplomatie
française.). Par ailleurs, le roi de France avait aussi un pouvoir
législatif, ayant l’initiative des lois et le pouvoir de les promulguer.
Conscient des changements que la Révolution française et la période
napoléonienne avaient engendré en France, le nouveau souverain avait en
effet décidé de ne pas faire table rase du passé.
Au
contraire, Charles, comte d’Artois, cadet du roi de France,
n’appréciait guère la politique de son frère. Vivant comme un étranger, ne
sachant pas ce qu’était un département ou un préfet, et réclamant sans cesse
que l’on débonapartise le pays, Charles souhaitait un retour à la
monarchie absolue.
Charles, comte d'Artois, par GERARD, 1819, château de
Versailles, Versailles.
Louis XVIII fut toutefois contraint de se réfugier en Belgique en mars 1815,
ayant appris que Napoléon, échappé de l’île d’Elbe, marchait vers Paris.
[1]
Le dauphin Louis Ferdinand et son épouse avaient eu dix enfants,
cinq filles et cinq fils (dont les futurs Louis XVI, Louis XVIII et
Charles X.).
[2]
Marie Joséphine était la fille de Victor Amédée III, roi de
Piémont Sardaigne.
[3]
La vénalité des charges avait été instaurée au cours du XVI°
siècle par François I°, afin de faire rentrer d’importantes
sommes d’argent dans les caisses de l’Etat. Dès lors, les hauts
fonctionnaires de l’Etat ne furent plus choisis par le souverain,
mais achetèrent leurs charges. Ce système, favorable sur le court
terme grâce aux rentrées d’argent qu’il occasionnait, fut toutefois
dramatique sur le long terme (d’autant plus que le phénomène ne
cessa de s’accroitre au fil des siècles.). En effet, les hauts
fonctionnaires furent plus riches que compétents, et affaiblirent
grandement l’administration royale.
[4]
Pour en savoir plus sur la Révolution française,
cliquez ici.
[5]
L’archevêque de Trèves était un des princes électeurs, dont
la fonction était d’élire l’Empereur du Saint Empire romain
germanique.
[6]
Léopold II était le frère de Marie Antoinette, épouse de Louis XVI.
[7]
Pour en savoir plus sur la bataille de Valmy, voir le b), 3, section
III, chapitre troisième, la révolution française.
[8]
Pour en savoir plus sur l’instauration de la première république et
les derniers jours de Louis XVI,
cliquez ici.
[9]
Selon la règle de primogéniture mâle, seuls les enfants de
sexe masculin pouvait succéder au roi. Si ce dernier s’éteignait
sans descendance, la couronne revenait alors au frère puiné du
défunt.
[10]
Le Directoire fut surnommé ainsi car il était composé de cinq
directeurs, chacun prenant le pouvoir à tour de rôle. Ces derniers
étaient toutefois soumis aux assemblées : le Conseil des
Cinq-Cents et le Conseil des Anciens.
[11]
A noter que Sieyès avait participé aux Etats Généraux de 1789,
siégeant sur les bancs du tiers état.
[12]
Pour en savoir plus sur la première campagne d’Italie, voir le 4,
section IV, chapitre quatrième, la Révolution française.
[13]
Pour en savoir plus sur la campagne d’Egypte, voir le 6, section IV,
chapitre quatrième, la Révolution française.
[14]
Date à laquelle son neveu Louis XVII était décédé.
[15]
Il s’agissait des biens de la noblesse, confisqués sous la
Révolution française.