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Mythologie
 
 

 

 

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Les Mérovingiens


CHAPITRE PREMIER : Les Francs avant Clovis


III : Les premiers Mérovingiens (IV° au V° siècle)

 

            1° Les origines nébuleuses des Mérovingiens –Nous avons vu précédemment que les Francs Saliens, sous la direction de Clodion le Chevelu, s’étaient installés dans la région de Tournai à compter de l’an 428. A sa mort, vers 450, il céda la couronne à son fils, Mérovée, qui donna son nom à la dynastie des Mérovingiens.

Ce dernier donna naissance à Childéric I°, qui à son tour enfanta Clovis I°.

 

Toutefois, si la descendance de Clodion n’est pas sujette à controverse (même si Mérovée est parfois considéré comme un personnage imaginaire), son ascendance est plus difficile à établir.

Ainsi, l’on peut établir deux arbres généalogiques des premiers Mérovingiens, l’une légendaire, l’autre historique.

 

A noter qu’il n’existe que peu de sources contemporaines relatant l’histoire des Francs : Histoire des Francs[1], par Saint Grégoire de Tours (rédigé entre 575 et 595) ; La chronique de Frédégaire[2], reprenant les travaux de Saint Grégoire, et poursuivant l’histoire des Mérovingiens jusqu’en 660 ; ainsi que le Livre de l’histoire des Francs, rédigé par un auteur inconnu, reprenant une fois encore les écrits de Saint Grégoire, et poursuivant l’histoire des Mérovingiens jusqu’en 727.

 

a) Arbre généalogique légendaire des premiers Mérovingiens : selon une source apocryphe du VI° siècle, Clodion serait le fils de Pharamond (ou Faramond), dont le nom signifie « protecteur de la tribu. »

Pharamon porté sur le pavois par les guerriers francs, par Pierre Henri REVOIL, 1845, conservé au Musée National du château et des Trianons de Versailles.

Ce personnage mythologique serait le fils de Marcomir, roi des Francs Ripuaires à la fin du IV° siècle.

Marcomir[3], quant à lui, serait un descendant de Francion, neveu d’Enée[4], qui voyagea jusqu’au Danube suite à la chute de Troie[5], y fondant la cité de Sicambrie (dans un récit postérieur, les Troyens quittèrent Sicambrie et fondèrent Lutèce).

 

La légende des origines troyennes des Francs eut un succès retentissant, n’étant démentie qu’à compter du XV° siècle. En effet, non seulement cette dernière donnait aux Francs et aux gallo-romains une origine commune ; en outre, elle faisait d’eux les héritiers d’un passé prestigieux. Après Rome, fondée par les descendants d’Enée, arrivait Lutèce (Paris), fondée par les descendants de Francion.

 

Pendant les croisades, entre le XI° et le XIII° siècle, le mythe des origines troyennes fut utilisé pour justifier l’hostilité existant entre Francs et Grecs, descendants des destructeurs de Troie.

 

A noter que certains historiens avancent l’hypothèse selon laquelle les scribes du haut Moyen-âge auraient confondue la légendaire Troie avec Colonia Ulpia Traiana (surnommée Troia[6]), occupée par les Francs Ripuaires à compter du V° siècle.

 

b) Arbre généalogique historique des premiers Mérovingiens : si l’arbre généalogique légendaire des premiers Mérovingiens, comme son nom l’indique, relève du mythe, leur arbre généalogique historique n’est pas non plus exempt de reproches.

Ainsi, si les personnages le composant semblent posséder un caractère historique, le manque cruel de sources ne nous permet que d’émettre des hypothèses sur l’ascendance de Clodion le Chevelu.

 

Ce dernier serait donc le fils de Théodemir, roi des Francs (peut être des Ripuaires et non des Saliens), qui fut assassiné par les troupes de l’Empereur Honorius vers 420 (ce dernier n’appréciant pas que le Franc ait apporté son soutien à des usurpateurs).

Cependant, si les sources mentionnent que Clodion régna après Théodemir, l’on ne sait pas exactement s’il existait un lien de parenté entre les deux hommes, ni s’il y eut une période d’interrègne.

 

Théodemir, quant à lui, était le fils de Richomer, qui fut général au service de Rome, magister militum, puis consul en 384.

Ce dernier serait l’enfant de Teutomer, qui combattit aux côté de l’Empereur julien. Toutefois, cette ascendance reste sujette à caution, car l’on ne sait pas de quelle tribu Teutomer était originaire.

 

            2° Le règne de Mérovée (450 à 457) – De Mérovée, qui régna entre 450 et 457, nous ne savons que peu de choses, d’autant que ce personnage est parfois considéré comme mythologique.

Selon certaines sources, il aurait vécu à Tournai, où s’était installé Clodion, participant à la bataille des champs catalauniques en 451. Certains historiens pensent que c’est le retentissement de cette importante victoire qui conféra à Mérovée son statut de souverain légendaire, étant parvenu, aux côtés de ses guerriers, à repousser l’invasion des Huns.

Mérovée, par Paul Lehugeur, XIX° siècle.

 

            3° Le règne de Childéric I° (457 à 481) – Childéric, qui était un coureur de jupon, fut détrôné par ses hommes et contraint de se réfugier en Thuringe, à la Cour du roi Basin.

Toutefois, ce dernier ne tarda guère à séduire la femme de son hôte, Basine, qu’il ramena avec lui à Tournai, suite à huit années d’exil. Peu de temps, en 466, naquit le premier enfant du couple, Clovis (ou Chlodowig[7]).

 

Mais si le règne de Childéric fut obscurci par celui de son fils, il convient de préciser que ce souverain participa à plusieurs évènements de grande importance.

Childéric et ses hommes, par Grzegorz Rosinski, musée d'Art et d'Histoire, Bruxelles.

 

a) Les évènements en Gaule pendant l’exil de Childéric (457 à 464) : comme nous l’avons évoqué précédemment, les vingt dernières années d’existence de l’Empire romain se déroulèrent dans un véritable climat d’anarchie, et de nombreuses provinces refusèrent de reconnaitre les derniers occupants du trône impérial.

 

En 456, suite au sac de Rome organisé l’année précédente par les Vandales du roi Genséric[8], le général Ricimer fut nommé patrice[9] par l’Empereur d’Orient. Ce dernier était un Suève, mais descendait aussi des Wisigoths par sa mère.

Homme fort du régime, Ricimer déposa l’Empereur Avitus, d’origine gauloise, puis soutint la candidature de Majorien, magister militum, qui fut proclamé par ses troupes au printemps 457.

Toutefois, les Gaulois, les Burgondes et les Wisigoths, anciens alliés d’Avitus, refusèrent de reconnaitre le nouvel Empereur. Majorien envoya alors en Gaule le général Aegidius, le nommant magister militum dans cette province.

Soutenu par les Francs, Aegidius força avec succès les insurgés à reconnaître Majorien comme Empereur.  

 

Cependant, la victoire d’Aegidius fut de courte durée, car Ricimer fit assassiner Majorien à l’été 461, ce dernier ayant tenté une offensive ratée contre les Vandales d’Afrique.

Le défunt fut remplacé par Sévère III, que de nombreuses provinces de l’Empire refusèrent de reconnaitre. Aegidius, coupé désormais de l’Italie (les Burgondes s’étaient emparés de Lugdunum), fut contraint d’organiser une enclave gallo-romaine au nord de la Gaule.

 

b) Les évènement en Gaule pendant le règne de Childéric (464 à 470) : à sa mort, en 464, Aegidius transmit son autorité à son fils, Syagrius. Ce dernier fut qualifié de roi des romains par les Francs, les Wisigoths et les Burgondes, bien qu’il n’adopta jamais ce titre.

 

Childéric, de son côté, assiégea Lutèce en 465, établissant un blocus de la ville qui dura dix ans[10] ; puis, en 469, il combattit les pirates Saxons installés sur les rives de la Loire aux côtés du comte Paul (ce dernier était vraisemblablement un lieutenant de Syagrius). Cependant, Paul mourut lors du siège d’Angers, dont Childéric s’empara en 470.

Toutefois, le roi des Francs fut contraint de faire face à la menace des Wisigoths (dont le territoire s’étendait d’Hispanie à la Loire), qui s’emparèrent de Tours.

 

c) Les dernières années de règne de Childéric (470 à 481) : à la mort de Ricimer, ce fut son neveu Gondebaud, roi des Burgondes, qui fut nommé patrice[11]. Ce dernier, ne pouvant s’assoir sur le trône, décida, en mars 473, de proclamer Empereur le dénommé Glycérius (sans doute un des anciens serviteurs de Gondebaud.).

Ce souverain, qui ne fut qu’une marionnette entre les mains du prince burgonde, ne fut pas reconnu par Zénon, l’Empereur d’Orient. Ainsi, ce dernier conféra le titre d’Empereur d’Occident à Julius Nepos, un de ses proches, qui débarqua en Italie en 474 à la tête d’une petite armée.

 

Déposant Glycérius et exilant Gondebaud, le nouveau venu ne fut qu’un piètre souverain, qui fut contraint de céder l’Auvergne aux Wisigoths. En 480, le général Flavius Oreste, outré par la politique de Julius Nepos, assassina l’Empereur, asseyant son fils Romulus Augustule sur le trône romain.

 

Cependant, Oreste et son fils furent rapidement confrontés aux Hérules, qui envahirent la plaine du Pô à l’été 476, sous la direction de leur chef Odoacre.

Vaincu, Oreste fut assassiné à Pavie, et son fils fut déposé. Odoacre envoya alors les insignes impériaux à Zénon, en gage de soumission. Ce dernier les accepta et nomma Odoacre roi d’Italie.  

 

Si la déposition du dernier Empereur romain, se fit dans l’indifférence quasi-générale, pour les Francs elle entrainait une remise en question de leur statut de fédéré. Si le foedus avait été respecté lors du règne des derniers Empereurs romains, devait il être poursuivi avec les Hérules ?

Toutefois, Childéric n’étant plus mentionné dans les sources contemporaines à compter de 470, l’on ne sait guère quelle attitude il adopta lors des dernières années de sa vie.

 

Décédé vers 481, Childéric fut enterré à Tournai. Sa tombe, oubliée pendant plusieurs siècles, fut découverte par un ouvrier en mai 1653.

L’examen de la sépulture permit de découvrir un important trésor : une fibule cruciforme servant à fermer le paladentum (il s’agissait d’un manteau de couleur pourpre, porté par les généraux romains), une épée d’apparat, un scramasaxe, une francisque, des bijoux, 300 abeilles d’or, un anneau portant l’inscription Childirici regis (« du roi Childéric »), une centaine de pièces d’or romaines frappées au nom de Zénon, etc.

Scramasaxe avec fourreau et fourreau reconstitué, VII° siècle, musée d'Art et d'Histoire, Bruxelles.

Ce trésor fut alors envoyé à Vienne[12], puis fut ensuite offert à Louis XIV en 1665[13].

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[2] A noter que l’auteur de cette chronique, baptisé Frédégaire à postériori, nous est inconnu. L’ouvrage fut vraisemblablement écrit à plusieurs mains, d’autant qu’il fut agrémenté de plusieurs annexes au fil des années.

[3] Bien que présent au sein d’une généalogie fictive, Marcomir est un personnage dont l’historicité n’est pas contesté. Vers 380, il lança plusieurs offensives en direction de Colonia Claudia Ara Agrippinensium (Cologne).

[4] Selon la mythologie romaine, Enée, suite à la chute de Troie, se dirigea vers l’Italie, où ses descendants fondirent Rome. Pour en savoir plus à ce sujet, cliquez ici.

[5] Selon la mythologie grecque, Troie fut assiégée par les Grecs pendant dix ans, le prince troyen Pâris ayant enlevé Hélène, épouse du roi Ménélas de Sparte. Pour en savoir plus à ce sujet, cliquez ici.

[6] Aujourd’hui Xanten, en Allemagne.

[7] Nom formé de hlod (« illustre ») et wig (« combat »), qui signifie « illustre au combat. » A noter que le prénom Chlodowig donna Ludovic (ou Louis) en français.

[8] Rappelons que Genséric, en 442, s’était déjà emparé de toute l’Afrique, comme nous l’avons vu en le a), 4°, section I, chapitre septième, histoire de la Rome antique.

[9] A l’origine, l’on appelait patriciens les membres des familles aristocratiques de Rome. Le patriciat, au IV° siècle, devint un titre décerné à une personne, et non plus à des familles entières. Lle titre de Patrice était troisième dans la hiérarchie romaine, après les titres d’Auguste (l’Empereur) et de César (successeur).  

[10] A noter que certains historiens contestent l’existence de ce siège, en plein territoire romain, à une époque ou Childéric entretenait des relations plutôt cordiales avec Aegidius.

[11] A l’origine, l’on appelait patriciens les membres des familles aristocratiques de Rome. Le patriciat, au IV° siècle, devint un titre décerné à une personne, et non plus à des familles entières. Lle titre de Patrice était troisième dans la hiérarchie romaine, après les titres d’Auguste (l’Empereur) et de César (successeur).  

[12] La Belgique (à l’époque Pays-Bas espagnols) vivait sous la domination des Habsbourgs d’Autriche.

[13] A noter qu’une grande partie du trésor de Childéric, conservé à la Bibliothèque royale (aujourd’hui Bibliothèque nationale de France), fut volé et fondu en 1831.

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