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Mythologie
 
 

 

 

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Les derniers Bourbons (1815 - 1830)

 

CHAPITRE PREMIER : Louis XVIII (1815 à 1824)

 

IV : Le retour des Ultras (1820 à 1824)

           

            1° Le second ministère de Richelieu (février 1820 à décembre 1821) – Suite au départ de Decazes, Louis XVIII décida de rappeler le duc de Richelieu, qui avait été approché au cours des jours précédents.

 

Ce dernier, connu pour sa modération, souhaitait mettre en place un ministère de consensus (rappelons que l’objectif du roi n’était pas de mettre en place un gouvernement contrôlé par les Ultras.).

Pasquier conservait le ministère des Affaires étrangères ; le comte de Serre retrouvait le portefeuille de la Justice ; Marie Charles César Florimond de Fay, comte de Latour-Maubourg et Pierre Barthélémy, baron Portal, étaient confirmés à la Guerre et à la Marine ; les Finances étaient cédées à Antoine, comte Roy ; l’Intérieur à Joseph Jérôme, comte Siméon.

 

Bien que s’étant ralliés à l’Empire lors du règne de Napoléon, les ministres promulguèrent une série de lois conservatrices : la loi sur la liberté individuelle (28 mars 1820.), permettant de détenir en prison les personnes suspectées de comploter contre le roi ou la sûreté de l’Etat ; loi sur les journaux (30 mars 1820.), remettant en place le système de l’autorisation préalable[1], et contraignant les journalistes à présenter leurs textes devant une commission de censure avant toute publication ; loi du double vote (30 juin 1820.), quant à elle, permettait aux électeurs payant le cens le plus élevé de voter deux fois.

 

Ces quelques mesures furent particulièrement mal appréciées par les libéraux et une partie de la population. Ainsi, la loi sur la presse condamnait à court terme les journaux les plus hostiles au pouvoir ; la loi sur le double vote favorisait les Ultras, qui le nouveau mode de scrutin donnant l'avantage aux plus riches.

C’est à partir de cette date que les contestations se firent de plus en plus véhémentes, libéraux, bonapartistes et républicains n’acceptant plus de servir un régime bafouant la charte de 1814[2].

De nombreux contestataires se rapprochèrent alors de Marie-Joseph Paul Yves Roch Gilbert du Motier, marquis de La Fayette[3]. Ce dernier, bien que n’ayant pas de responsabilité politiques, restait dans les mémoires comme le vainqueur de la guerre d’indépendance américaine[4] et l’homme providentiel des débuts de la Révolution française.

Le marquis de La Fayette, 1824.

La Fayette fut ainsi associé à plusieurs sociétés secrètes, telles que les Amis de la vérité, l’Association de janvier, etc.

 

Malgré les contestations engendrées par les mesures votées précédemment, les élections de novembre 1820 entraînèrent l’arrivée de nombreux Ultras au sein de l’assemblée (à noter que certains électeurs, défavorables au gouvernement, furent exemptés d’impôts afin de les empêcher de voter.).

Suite à ces élections, le duc de Richelieu décida de faire rentrer Jean Baptiste Villèle au sein du gouvernement, mais ne lui confia pas de portefeuille (l’objectif était de ce concilier les faveurs des Ultras, dont le nouveau ministre était l'un des chefs.).

 

Preuve de la supériorité des Ultras au sein de la Chambre des députés, fut votée en avril 1821 une loi interdisant à un député de prendre la parole dans le cas où il aurait été appelé deux fois à l’ordre par le président.

Alors que les séances à l’assemblée étaient de plus en plus houleuses, les députés apprirent la mort de Napoléon dans le courant de l’été (l’Empereur déchu, exilé à Sainte Hélène, était décédé le 5 mai 1821.). Cette nouvelle rapprocha les libéraux des bonapartistes, qui devinrent dès lors plus conciliants.

Procession funèbre sur l'île de Sainte Hélène, suite au décès de Napoléon.

 

Le duc de Richelieu, alors en position délicate, ne tarda guère à voir son assise vaciller. Ainsi, Villèle décida de quitter le gouvernement en juillet 1821, le premier ministre ayant refusé de lui confier un poste ; en octobre de la même année, les élections législatives furent une victoire pour les Ultras, qui parvinrent à l’emporter face aux candidats du gouvernement ; enfin, les ultraroyalistes décidèrent de s’allier avec les libéraux les plus révolutionnaires afin de faire tomber le ministère.

 

Face à une chambre des députés de plus en plus ingouvernable, Richelieu menaça les députés d’une dissolution. Toutefois, le premier ministre n’étant pas soutenu par Louis XVIII, il décida de démissionner une seconde fois, le 13 décembre 1821[5].

 

            2° Le gouvernement de Villèle sous Louis XVIII (décembre 1821 à septembre 1824) – A l’annonce du départ de Richelieu, Charles, comte d’Artois (le frère cadet de Louis XVIII.), fut chargé de constituer un nouveau gouvernement. Ce dernier accorda donc sa confiance à Jean Baptiste Villèle, membre influent des Ultras.

Portrait de Jean Baptiste Villèle.

 

a) La constitution d’un nouveau gouvernement : le nouveau ministère fut particulièrement différent du précédent, tous les anciens ministres ayant été renvoyés. Ainsi, Villèle récupéra le portefeuille des Finances ; Mathieu Jean Félicité, duc de Montmorency-Laval, reçut les Affaires étrangères ; Jacques Joseph, comte de Corbière, eut l’Intérieur ; Pierre Denis, comte de Peyronnet, la Justice ; Aimé Marie Gaspard, vicomte de Clermont-Tonnerre, la Marine ; et Claude Victor Perrin[6], la Guerre.

 

Le 25 mars 1822, la Chambre des députés vota une nouvelle loi sur la presse, augmentant le nombre de délits ainsi que les peines encourues. Ainsi, afin d’éviter de nombreux procès, les journaux hostiles au gouvernement furent contraints de modérer considérablement leurs propos.

 

Puis, le 17 août 1822, Villèle reçut le titre de comte des mains de Louis XVIII (l’objectif était vraisemblablement de rabrouer Clermont-Tonnerre, qui n’était que vicomte, et qui n’appréciait guère obéir à Villèle.).

 

b) Villèle contre la charbonnerie : dès le début de son mandat, le comte de Villèle s’attaqua à la charbonnerie, un mouvement français d’origine italienne (à l’origine, les carbonari souhaitaient l’indépendance et l’unification de la péninsule italique.).

Cette société secrète était composée en majorité de jeunes, de bonapartistes et libéraux. Ces derniers, avocats, médecins, commerçants ou militaires, n’appréciaient ni la restauration, ni le traité de 1815. L’objectif des conjurés était donc de renverser les Bourbons, mettre en place une assemblée constituante, rétablir la liberté de la presse et des cultes.

A Paris, la charbonnerie réunissait près de 4 000 personnes, mais était aussi présente en Province (est, nord et région du Rhône.). Toutefois, le mouvement ne fut jamais vraiment dangereux, les conspirations échouant en raison de l’inexpérience des conjurés.

 

C’est en septembre 1822 que furent inculpés les quatre sergents de La Rochelle, de jeunes militaires[7] hostiles à la restauration et membres de la charbonnerie. Les quatre prévenus, déclarés coupables de haute trahison, furent alors guillotinés sur la place de l’Hôtel de Ville.

L'exécution des quatre sergents de La Rochelle.

 

De nombreux militaires et civils étant incarcérés en raison de leurs liens avec la charbonnerie, le mouvement finir par s’éteindre au fil des mois.

 

c) Villèle contre les universités : lors de la rentrée de septembre 1822, Villèle décida de s’attaquer aux universités. En effet, de nombreux étudiants, conspuant l’autorité royale, avait fait preuve d’un trop grand attachement au libéralisme.

Ainsi, l’école de médecine et l’école de droit furent fermées en novembre ; l’école normale supérieure fut supprimée (elle n’ouvrit à nouveau ses portes qu’en 1826.) ; enfin, le corps enseignant fut épuré (Villèle fit alors rentrer de nombreux ecclésiastiques au sein des universités.).

 

En novembre 1822, les élections législatives donnèrent la victoire aux candidats du gouvernement, Villèle ayant ordonné de faire pression sur les électeurs.

 

            3° La campagne d’Espagne (1822 à 1823) – Suite à la défaite de Napoléon, le roi d’Espagne Ferdinand VII avait finalement retrouvé son trône. Toutefois, alors qu’il souhaitait mettre en place une monarchie absolue, de nombreux libéraux souhaitaient remettre en vigueur la constitution de mars 1812[8] (qui avait été votée lors du règne de Joseph I°, frère aîné de Napoléon.)

Dans un premier temps, Ferdinand VII tenta de résister ; puis, acculé, il décidé de faire appel à la Sainte Alliance.

 

a) Tergiversations en France (été 1822) : si le vicomte de Clermont-Tonnerre, faisant passer des armes et de l’argent aux royalistes espagnols, était favorable à une expédition militaire, Villèle, au contraire, était opposé à une intervention de la France dans ce conflit.

Ainsi, le premier ministre savait que cette nouvelle campagne, en plus d’être incertaine (développement de la charbonnerie au sein de l’armée.), serait particulièrement couteuse. Par ailleurs, Villèle redoutait qu’une intervention en Espagne ne soit impopulaire.

Les Ultras, au contraire, voyaient là une occasion de redorer le blason des Bourbons, ainsi que de réussir où Napoléon avait échoué.

Session royale pour l'ouverture de la session des chambres au Louvre, le 28 janvier 1823, au cours de laquelle fut annoncée l'expédition d'Espagne, par Charles Caïus RENOUX, 1843, musée du Louvre, Paris.

 

En octobre 1822, les puissances européennes se réunirent lors du Congrès de Vérone. La France, qui jusque là s’était contentée de déployer des forces sur la frontière pyrénéenne, fut alors chargée d’intervenir en Espagne.

 

b) La nouvelle campagne d’Espagne (printemps à automne 1823) : Villèle et Louis XVIII, ayant constaté que les membres du gouvernement étaient favorables à une intervention, décidèrent donc de mettre en place une expédition vers l’Espagne.

 

Le commandement de la campagne fut alors confié à Louis Antoine d’Artois, duc d’Angoulême (ce dernier était le fils aîné de Charles, comte d’Artois, frère cadet de Louis XVIII.).

Louis Antoine d'Artois, duc d'Angoulême, par KINSON, début du XIX° siècle, château de Versailles, Versailles.

Traversant les Pyrénées à la tête de 80 000 hommes le 7 avril 1823, le duc d’Angoulême fut bien accueilli par les espagnols royalistes, le clergé et la paysannerie (ceux-là même qui avaient lutté contre Napoléon dix années auparavant.).

L’armée des libéraux, constatant l’avance des Français, décida alors de reculer.

 

Le 24 mai, les Français entrèrent dans Madrid au terme d’une simple promenade militaire. Ferdinand VII, quant à lui, avait été capturé par les libéraux et emmené avec eux à Séville. Toutefois, voyant les Français approcher une fois de plus, les insurgés décidèrent de se replier vers Cadix, emportant avec eux leur souverain prisonnier.

 

Arrivant devant Cadix, le duc d’Angoulême décida d’assiéger la cité (30 août 1823.). Pendant plusieurs jours, les assiégés tentèrent de résister, mais l’arrivée des navires français dans la rade de Cadix enleva tout espoir de victoire aux libéraux.

Bombardement de Cadix, le 23 septembre 1823, par CREPIN, début du XIX° siècle, château de Versailles, Versailles.

Résignés, ces derniers décidèrent de capituler le 20 septembre 1823.

 

Ferdinand VII fut alors restauré, et décida alors de mettre en place une Terreur blanche. Le duc d’Angoulême, soucieux d’éviter une nouvelle guerre civile, proposa au souverain espagnol de promulguer une amnistie, en vain.

Louis Antoine d’Artois décida de rentrer à Paris, alors que Ferdinand VII annulait tous les décrets adoptés de force lors de sa captivité (dont la reconnaissance de la constitution de 1812.).

Lieutenant général en tenue de société, 1822-1830, musée des Invalides, Paris.

 

A noter cependant que si Cadix était tombée, de nombreuses cités étaient encore entre les mains des libéraux à l’automne 1823. Ainsi, manquant de matériel de siège, les Français ne prirent certaines villes du nord du pays qu’au cours de l’hiver (Pampelune, Saint Sébastien, Barcelone, etc.).

Prise de Pampelune, le 7 septembre 1823, par VERNET, début du XIX° siècle, château de Versailles, Versailles.

 

La campagne d’Espagne avait été victorieuse, mais il fut toutefois décidé de laisser en place un corps d’occupation de 45 000 hommes (à noter que la péninsule ibérique ne fut évacuée qu’à partir de 1828.).

Louis XVIII assiste au retour de l'armée d'Espagne aux Tuileries, le 2 décembre 1823, par DUCIS, début du XIX° siècle, château de Versailles, Versailles.

 

            4° La mort de Louis XVIII (septembre 1824) – En décembre 1823, Villèle décida de dissoudre la Chambre des députés. Les élections législatives de février 1824, conformément aux attentes du gouvernement, furent un succès.

 

Ainsi, les royalistes et les Ultras remportèrent la grande majorité des sièges, les libéraux devant s’en contenter d’une quinzaine.

Par ailleurs, les bonapartistes furent moins hostiles en raison de la campagne d’Espagne (expédition qui avait rallié l’armée aux Bourbons.) ; La Fayette, parti visiter les Etats Unis, avait emporté avec lui son goût pour la conspiration.

Enfin, c’est à partir de cette date que l’opposition, peu présente au sein de l’assemblée, commença à se faire plus présente dans la presse.

 

Le 9 juin, les députés de la chambre retrouvée[9] (selon les mots de Louis XVIII.), votèrent une loi prévoyant le renouvellement total de l’assemblée tous les sept ans. Puis, à la mi-août, la censure fut renforcée, entraînant la suppression de nombreux journaux.

 

Louis XVIII, qui avait toujours tenté de préserver les acquis de la Révolution française et de l’Empire, était alors en très mauvaise santé. Ce dernier, souffrant l’hydropisie et l’artériosclérose, fut contraint de s’aliter à partir de septembre 1824.

A l’issue d’une agonie longue de trois jours, le roi de France expira le 16 septembre 1824.

La mort de Louis XVIII.

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[1] Comme nous l’avons vu précédemment, il s’agissait d’un document émis par le gouvernement, qui permettait au demandeur de créer un journal. A noter que la loi Serres de 1819 avait supprimé l’autorisation préalable.

[2] Pour en savoir plus sur la charte de 1814, cliquez ici.

[3] La Fayette avait joué un rôle important lors de la guerre d’indépendance américaine et de la Révolution française. Déclaré hors la loi et contraint de quitter la France en 1792, La Fayette joua un rôle mineur lors de l’Empire (il n’appréciait pas le caractère autoritaire de Napoléon.). Rallié au Bourbons lors de la restauration, La Fayette se rapprocha toutefois des mouvements républicains au cours des années 1820.

[4] Pour en savoir plus sur la guerre d’indépendance américaine, cliquez ici.

[5] Le duc de Richelieu mourut peu de temps après sa démission, en mai 1822.

[6] A noter que Perrin était un maréchal de Napoléon, mais ce dernier s’était tenu à l’écart de l’Empereur lors des Cent-Jours.

[7] Tous étaient âgés d’une vingtaine d’années.

[8] Voir à ce sujet le 1, section III, chapitre quatrième, l’épopée napoléonienne.

[9] La chambre retrouvée faisait référence à la chambre introuvable de 1816, elle aussi composée en majorité d’Ultras.

 
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