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Mythologie
 
 

 

 

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L'Empire byzantin

 

CHAPITRE TROISIEME : L'Empire byzantin, entre grandeur et décadence

 

VII : Les Comnènes (1081 à 1185), le rétablissement de l’Empire

           

            1° Alexis I° Comnène (1081 à 1118) – Alexis I° Comnène, né en 1048, était le neveu de l’Empereur Isaac Comnène[1]. Elevé par sa mère Anne Dalassène comme un prétendant au trône impérial, Alexis épousa très tôt une carrière militaire. Accédant rapidement au grade de général, il parvint à s’attirer de nombreuses sympathies en éliminant de nombreuses menaces pour l’Empire (Roussel de Bailleul en 1076, Nicéphore Bryenne en 1079, Nicéphore Basilakes et Nicéphore Mellissenos en 1080, etc.).

Pièce de monnaie à l'effigie d'Alexis Comnène, British Museum, Londres.

 

En 1081, incité par Jean Doukas, Alexis détrôna Nicéphore III et l’enferma dans un monastère. Afin de ne pas être rejeté par la population, le nouvel Empereur reconnu les droits au trône de Constantin Doukas, le fils de Michel VII (il le fiança alors à sa fille, Anne Comnène.).

Représentation d'Alexis I° Comnène, bibliothèque du Vatican.

A noter qu’à la naissance de Jean II Comnène en 1087, Constantin Doukas fut écarté du pouvoir, et mourut peu de temps après. Anne, quant à elle, épousa par la suite Nicéphore Bryenne, le fils du général éponyme.

 

a) L’Empire byzantin en 1081 : lors de l’accession d’Alexis I° au pouvoir, l’Empire byzantin était dans un triste état. La crise financière qui frappait le pays depuis près de dix ans n’avait toujours pas été endiguée, et de nombreux ennemis tentaient alors d’abattre l’Empire.

L'Empire byzantin lors de l'accession d'Alexis I° au pouvoir, en 1081 (vous pouvez faire un "clic droit" sur la carte afin de faire un zoom).

Les Normands de Robert Guiscard, après avoir chassé les Byzantins d’Italie méridionale, s’attaquaient à présent aux Balkans.

Les Pétchenègues, quant à eux, lançaient des raids contre les possessions byzantines depuis plusieurs années. Les Byzantins ne leur opposant pas de résistance, ils décidèrent alors de continuer à dévaster le pays.

Enfin, en Asie mineure, les Seldjoukides s’étaient emparés de l’Anatolie, et de nombreuses régions avaient proclamé leur indépendance.

 

Pour commencer, Alexis I° décida de s’attaquer à la grave crise financière qui frappait l’Empire byzantin. L’Empereur décida alors d’augmenter les impôts, taxant drastiquement les nobles et le clergé. En outre, Alexis remplaça les peines de prison par des peines financières, bien plus utiles à l’Etat. Enfin, l’Empereur décida en 1082 d’accorder d’énormes avantages commerciaux à Venise (cette décision fut préjudiciable à long terme, car elle favorisait le commerce de la cité lacustre au détriment du commerce byzantin.).

 

En outre, Alexis I° décida de s’allier avec les familles aristocratiques de Constantinople, plaçant ces dernières à la tête de l’administration impériale (afin de mettre fin aux risques d’insurrection.). De ce fait, l’Empereur n’eut pas de problèmes vis-à-vis de la noblesse, mais cela entraina la disparition du système méritocratique. En effet, au fil des années, seules les personnes issues de la noblesse purent accéder aux plus hautes charges de l’Empire.

 

Au final, après avoir consolidé son pouvoir, Alexis I° put enfin s’attaquer à ses ennemis.

 

b) Guerre contre les Normands (1081 à 1085) : à l’époque, les adversaires les plus dangereux de l’Empire étaient les Normands. En effet, Robert Guiscard, leur chef, désirait s’emparer de Constantinople afin de se proclamer basileus.

Au cours de l’été 1081, les Normands mirent le siège devant Dyrrachium, tentant de s’emparer de la ville. En octobre, Alexis I° tenta de s’attaquer à ces derniers, en vain. La ville tomba en février 1082, et Robert Guiscard fut alors rappelé en Italie par le pape Grégoire VII, menacé par l’Empereur germanique Henri IV[2] (en effet, en froid avec l’Empire byzantin et l’Empire romain germanique, la papauté s’était alliée avec les Normands en 1059[3].).

Avant de partir, Robert Guiscard confia la suite des opérations à son fils Bohémond de Tarente. Ce dernier fut dans un premier temps à la hauteur de la tâche, car il parvint à infliger deux nouvelles défaites aux Byzantins, en 1082 et 1083.

Cependant, grâce à l’intervention de la flotte vénitienne qui coupa les communications normandes, Alexis put alors contre-attaquer et s’emparer de la Thessalie.

En 1083, Bohémond quitta la Grèce, et son père mourut peu de temps après, en 1085.

Le danger normand fut alors écarté pour quelques années.

 

c) Guerre contre les Seldjoukides (1085 à 1092) : une fois le danger normand écarté, Alexis I° put alors s’attaquer aux Turcs seldjoukides. A cette époque, l’Empire byzantin avait perdu la quasi-totalité de ses possessions en Asie mineure. Cependant, la situation était favorable à Alexis I°, car les Seldjoukides étaient en pleine crise.

 

En 1077, Süleyman I° Shah, parent d’Alp Arslan (qui avait vaincu les Byzantins à Manzikert.), avait fondé le sultanat de Rum. S’emparant par la suite de l’est de l’Anatolie et de la cité d’Iconium, les Byzantins reconnurent les possessions de Süleyman en échange d’un serment de vassalité.

Peu après, ce dernier s’empara d’Antioche, en décembre 1084, puis menaça Alep, alors entre les mains de Tutuch, frère du sultan de Bagdad Malik Shah I° (fils d’Alp Arslan.). En 1085, ce dernier décida de répliquer en s’emparant d’Antioche, tuant Süleyman, et capturant son fils Kilich Arslan I°.

Tutuch tenta alors de s’attaquer à l’Anatolie, mais fut contré par les Byzantins, qui le contraignirent alors à reculer.

 

A cette époque, un Turc nommé Zachas se proclama émir de Smyrne, et tenta de rassembler sous ses ordres les roitelets d’Asie mineure qui avaient proclamé leur indépendance. S’emparant de nombreuses îles de la mer Egée, Zachas décida de s’attaquer à Constantinople en 1090. Cependant, les Byzantins parvinrent à infliger une défaite navale à cet adversaire.

 

En 1092, à la mort de Malik Shah, Kilich Arslan put finalement rentrer en Anatolie. Il épousa alors la fille de Zachas, l’émir de Smyrne, qui souhaitait trouver un allié pour lutter contre les Byzantins. Cependant, Kilich Arslan, influencé par les Byzantins, préféra assassiner son beau père en 1093.

 

d) Guerre contre les Petchenègues (1086 à 1091) : malgré ce terrain favorable en Asie mineure, Alexis I° ne put intervenir car il fut attaqué sur ses arrières par les Petchenègues.

Ces derniers, repoussés par les Russes, lançaient des raids sur la région du Danube depuis déjà plusieurs années. Les Petchenègues s’étant emparés de la Thrace, Alexis I° décida alors de riposter. En 1090, il lança ses armées contre ses ennemis, mais l’attaque fut un échec. Par la suite, les Petchenègues tentèrent de s’allier avec Zachas, émir de Smyrne.

Les Byzantins s’allièrent alors aux Coumans, un peuple d’origine turque basé dans l’Ukraine actuelle, qui s’attaquèrent aux Petchenègues. Ces derniers furent alors vaincus par Alexis I° et ses alliés, suite à la bataille de la colline de Lebounion (avril 1091.).

Les Petchenègues furent alors massacrés ou intégrés dans l’armée impériale.

 

e) Les relations entre Alexis I° et l’Occident, la première croisade (1095 à 1099)[4] : le pape Grégoire VII avait décidé d’excommunier Nicéphore III lorsque ce dernier avait renversé son prédécesseur, en 1078.

Par la suite, cette excommunication frappa aussi Alexis I° lorsqu’il s’empara du pouvoir. Malgré les tentatives de rapprochement de la part de l’Empereur byzantin, Grégoire VII ne voulut rien savoir, et il fallut attendre sa mort pour assister à un apaisement des relations entre Orient et Occident. En 1089, le pape Urbain II (de son vrai nom Odon de Lagny, un Français.) leva l’excommunication qui frappait Alexis I°.

 

En 1095, Urbain II et les Normands parvinrent finalement à vaincre Henri IV, qui ne fut dès lors plus un danger. Début 1095, le pape décida alors de réunir un concile à Plaisance, où il exposa son projet d’intervention en Terre Sainte. Des émissaires Byzantins prirent alors la parole, évoquant les difficiles conditions de vie des chrétiens d’Orient sous le joug musulman. Au final, la réunion provoqua l’enthousiasme des participants, d’autant plus que l’islam était alors en net recul en Europe (Italie, Sicile, Espagne, etc.). Toutefois, la mise en pratique d’une telle expédition vers la Terre sainte refroidit les ardeurs. 

En novembre de la même année, Urbain II tint le concile de Clermont, où il exposa à nouveau ses projets de croisade.

Urbain II prêchant la croisade à Clermont en 1095, par Sébastien MAMEROT, enluminure issue de l'ouvrage Les Passages d'outremer faits par les François contre les Turcs depuis Charlemagne jusqu'en 1462, France, 1475, Bibliothèque Nationale de France.

L’appel du pape fut entendu par de nombreux fidèles, nobles ou paysans, et le départ pour la croisade fut prévu pour août 1096.

 

A Constantinople, Alexis I° apprit rapidement que l’Occident n’allait pas envoyer quelques mercenaires, mais bien une gigantesque armée de plusieurs dizaines de milliers d’hommes. L’objectif était donc pour l’Empereur de veiller à ce que les croisés ne commettent pas de pillages en Grèce.

Bien que le départ pour la croisade fût prévu pour août 1096, de nombreux paysans décidèrent de ne pas attendre et montèrent leur propre expédition : la croisade populaire. Comptant plusieurs dizaines de milliers d’hommes, ces bandes étaient menées par un chevalier du nom de Gautier Sans Avoir et par Pierre l’Ermite.

Pierre l'Ermite menant la croisade populaire, enluminure issue de l'ouvrage Abreviamen de las Estorias, XIV° siècle.

Ces croisés épuisant rapidement leurs vivres, ils commencèrent à s’attaquer aux villages présents sur leur route, tuant aussi de nombreux juifs. Les Bulgares et les Hongrois ne laissèrent pas ces crimes impunis, tuant de nombreux occidentaux.

Encadrés par la suite par des contingents byzantins, la croisade populaire arriva en août 1096 sous les murs de Constantinople, souffrant d’un effectif déjà réduit.

 

Les hommes de Pierre l’Ermite exigeant alors d’être transportés de l’autre côté du Bosphore, sans attendre les chevaliers de la ‘vraie’ croisade, Alexis I° s’empressa de les faire passer en Asie Mineure, après leur avoir donné quelques vivres et un peu d’argent.

Après avoir débarqué et mis à sac quelques villages chrétiens, les Turcs de Kilich Arslan les massacrèrent au camp de Civitot, et très peu survécurent. Pierre l’Ermite, qui avait rebroussé chemin peu de temps auparavant pour aller quérir de l’aide auprès d’Alexis I°, échappa ainsi au massacre.

Les Turcs massacrant les Latins de la croisade populaire, enluminure du XV° siècle.

 

Les grands seigneurs, quant à eux, arrivèrent à Constantinople en octobre 1096. Selon les chroniqueurs occidentaux, Alexis I° prit peur en voyant la multitude des croisés, rassemblés sous les murs de la capitale de l’Empire Byzantin. La fille de l’Empereur, Anne Comnène, compara ces hommes aux grains de sable de la mer tant ils étaient nombreux.

Alexis I° décida alors de s’entretenir avec les chefs de la croisade. Ces derniers devaient jurer fidélité à l’Empire byzantin et rendre les terres prises aux infidèles ; en échange, Alexis I° assurerait le financement de l’expédition et mettrait sa flotte à la disposition des croisés.

 

En juin 1097, les croisés parvinrent à s’emparer de Nicée, qu’ils remirent à Alexis I°, puis se rendirent en Anatolie.

Les croisés s'emparent de Nicée, par Guillaume de Tyr, enluminure issue de l'ouvrage Histoire d'Outremer, XIII° siècle, bibliothèque nationale de France.

En juillet, ils combattirent les Turcs de Kilich Arslan à la bataille de Dorylée. L’affrontement fut une victoire pour les croisés, et les Byzantins purent ainsi récupérer une bonne partie de l’Asie mineure (Chios, Rhodes, Smyrne, Ephèse, Sardes, etc.).

La bataille de Dorylée, enluminure issue de l'ouvrage Histoire d'Outremer, XIV° siècle, bibliothèque nationale de France.

Par la suite, les croisés se dirigèrent vers Antioche, et entamèrent le siège de la ville en octobre. Le siège fut long, et de nombreux croisés commencèrent à douter de leurs chances de victoire. Finalement, la cité tomba en juin 1098, et les bonnes relations avec Alexis I° prirent alors fin. En effet, les croisés prétextèrent la défection des troupes byzantines pour mettre fin à l’accord.

Le siège d'Antioche par les croisés, par Sébastien MAMEROT, enluminure issue de l'ouvrage Les Passages d'outremer faits par les François contre les Turcs depuis Charlemagne jusqu'en 1462, 1475, Bibliothèque Nationale de France.

Alexis I° ne put donc pas contrôler les forces occidentales en Terre Sainte, qui, après avoir pris Jérusalem, formèrent les Etats croisés en 1099 : le comté d’Edesse, le royaume de Jérusalem, la principauté d’Antioche (le comté de Tripoli fut fondé quelques années après, en 1109[5].).

Les Etats de terre sainte au XII° siècle.

 

f) La fin de règne : Suite à la première croisade, Alexis I° ne lança pas d’autres attaques contre les Turcs. Cependant, de nouveaux troubles lui donnèrent l’occasion de reprendre les armes.

 

En 1105, Bohémond de Tarente, qui avait reçu la ville d’Antioche en 1098, décida de s’attaquer à l’Empire byzantin (fait prisonnier par les musulmans en 1100 et libéré en 1103, Bohémond s’était rendu en Europe en 1104 afin de quérir des renforts.).

En 1108, malgré les succès initiaux, le Normand fut vaincu, et dut reconnaître la suzeraineté de l’Empire byzantin sur Antioche (signature du traité de Déabolis.). Son cousin Tancrède, qui était alors en charge de la ville, dénonça rapidement ce traité.

 

Alexis I°, au cours de ces dernières années de règne, s’attaqua aussi aux bogomiles dans les Balkans (il s’agissait de chrétiens inspirés par le manichéisme, une doctrine considérant que le monde était divisé en deux parties, l’une bonne, l’autre mauvaise.) et aux pauliciens (ces derniers prônaient un retour au culte chrétien originel, rejetant le clergé, les Saints, les cérémonies religieuses, etc.). Ces deux sectes étaient en effet considérées comme hérétiques par l’Eglise.

 

Peu de temps avant sa mort, Alexis I° fut troublé par la question de sa succession. En effet,  son fils Jean II et son beau fils Nicéphore Bryenne rivalisaient pour obtenir le pouvoir.

 

Au final, le bilan d’Alexis I° fut globalement positif. En effet, ce dernier parvint à stabiliser la frontière danubienne, à reconquérir de nombreux territoires d’Asie mineure, à mettre fin à la crise financière et aux oppositions de la noblesse.

Cependant, si Alexis I° apporta des solutions qui furent bénéfiques sur le moment, elles furent néanmoins très préjudiciables à long terme.

 

            2° Jean II Comnène Kaloiannis (1118 à 1143) – Alors que leur père se trouvait agonisant sur son lit de mort (août 1118.), Jean II et son frère Alexis s’emparèrent de l’anneau impérial. Nicéphore Bryenne ne réagissant pas, malgré l’instance de son épouse Anne, Jean II se fit alors proclamer Empereur.

Jean II Comnène et son épouse Irène aux côtés de la Vierge Marie et du Christ, mosaïque de l'église Sainte Sophie, Constantinople.

Sa mère et sa sœur conspirant contre lui, Jean II décida de les envoyer dans des monastères (il les pardonna finalement quelques années après. Anne composa alors l’Alexiade, un récit de la vie de son père). 

 

Né en septembre 1087, Jean II, surnommé Kaloiannis (ce qui signifie ‘le Bon’.), fut un souverain très apprécié par ses contemporains. De nombreux chroniqueurs byzantins relatèrent la vie de Jean II, mais ces ouvrages sont cependant de véritables apologies (de ce fait, il est aujourd’hui difficile de porter un jugement objectif sur le règne de ce souverain.).

Une fois arrivé au pouvoir, le nouvel Empereur nomma ses proches à des postes importants. Son ami d’enfance Jean Axuch, d’origine turque, devint alors son premier secrétaire.

 

En 1122, Jean II écrasa les Petchenègues qui s’étaient révoltés, suite à la mort d’Alexis I°. Par la suite, il parvint à imposer sa suzeraineté à la Serbie (1124.) et à repousser une invasion hongroise sur le Danube (1128.).

 

En 1126, l’Empereur ne parvint cependant pas à revenir sur le traité de 1082 passé entre Alexis I° Comnène et les Vénitiens (qui garantissait d’énormes privilèges commerciaux à ses derniers.).

Cependant, afin de mettre fin au monopole de Venise, Jean II décida d’ouvrir Constantinople à Pise et Gênes, deux cités rivales des Vénitiens.

 

En Asie mineure, Jean II s’opposa aux Turcs, s’emparant de la Cilicie et d’une partie de l’Asie mineure (1137). Raymond de Poitiers, qui avait été fait prince d’Antioche en épousant Constance, petite fille de Bohémond, décida alors de s’attaquer à la Cilicie.

Jean II décida donc de riposter, et parvint brièvement à établir la suzeraineté byzantine sur Antioche.         

Lors d’une partie de chasse sur le mont Taurus (en Cilicie.), l’Empereur fut accidentellement infecté par une flèche empoisonnée. En avril 1143, Jean II décida alors de choisir son fils cadet Manuel I° Comnène comme son successeur (étant inquiet de l’irascibilité de son aîné, Isaac.).

Certaines sources affirment qu’il fomentait sans doute un plan contre les Etats croisés ou l’est de l’Anatolie.

 

            3° Manuel I° Comnène (1143 à 1180) – Manuel I° Comnène, né en novembre 1118, était le quatrième fils de Jean II et de son épouse Piroska (rebaptisée Irène.), fille du roi de Hongrie Ladislas I°.

Pièce de monnaie à l'effigie de Manuel Comnène.

Manuel I°, peu de temps après la mort de son père, qui le préféra à son aîné Isaac, dut alors retourner à Constantinople. Le voyage jusqu’à la capitale étant long, le nouvel Empereur ordonna donc à Jean Axuch d’enfermer Isaac jusqu’au couronnement (afin de prévenir tout velléité d’insurrection.).

Finalement, après avoir été proclamé Empereur, Manuel I° libéra son frère.

 

a) Manuel I° et la deuxième croisade (1147 à 1148)[6] : en 1144, peu de temps après avoir été couronné, Manuel I° se retrouva en conflit avec Raymond de Poitiers, prince d’Antioche. En effet, ce dernier réclamait la Cilicie, qui avait été prise par les Byzantins sous Jean II Comnène.

Cependant, la même année, l’atabeg[7] Zengi (qui régnait déjà sur Alep et Mossoul.) s’empara du comté d’Edesse. Raymond de Poitiers, suite à la chute de la cité, dut alors se résoudre à reconnaître la suzeraineté de Manuel I° sur Antioche.

 

Suite à la chute du comté d’Edesse, une deuxième croisade fut mise en place. En 1147, les nouveaux croisés prirent ainsi la route de Constantinople. Cette fois ci, les souverains des deux plus importants pays d’Europe décidèrent de participer à l’expédition : Louis VII, roi de France, et Conrad III, Empereur d’Allemagne.

Les premiers arrivés à Constantinople furent les croisés germaniques. Comme au cours de la première croisade, les Occidentaux commirent des dégradations auxquelles les Byzantins répliquèrent sèchement. L’inimitié entre les Latins et les Francs était alors à son comble.

Malgré son mariage avec Berthe, la belle sœur de Conrad III, Manuel I° ne put recevoir le serment de vassalité de l’Empereur d’Allemagne, ni du roi de France.  

En outre, Roger II, roi de Sicile, neveu de Robert Guiscard, s’était emparé de Corfou, et pillait les côtes grecques.

Roger II couronné par le Christ, mosaïque de l'église La Martorana, Palerme.

Manuel I°, afin de protéger ses arrières, décida alors de signer un traité de paix avec Masud I°, sultan de Rum (cette trêve fut sévèrement critiquée par les croisés.).

 

Par la suite, les croisés se rendirent en Terre Sainte. Cependant, incapables de s’entendre et ne connaissant pas les réalités politiques du pays, ils ne surent renouveler l’exploit de leurs prédécesseurs. L’expédition fut un échec, et les deux souverains rentrèrent marris dans leurs pays respectifs (1148.).

 

b) L’expédition en Italie (1147 à 1158) : alors que la deuxième croisade battait son plein, Manuel Comnène dut faire face à Roger II de Sicile, qui avait pris Corfou, et menaçait les côtes grecques. Cependant, grâce à l’aide des Vénitiens qui détruisirent la flotte de Roger II, Manuel I° parvint à contre-attaquer. Après avoir repris Corfou, il décida de mener une expédition en Italie. Attaquant l’Apulie en 1155, les Byzantins ne purent avoir le soutien de l’Empereur germanique Frédéric Barberousse (qui venait de quitter Rome après avoir été couronné par le pape Adrien IV[8].), mais ils furent aidés par certains de ses barons.

Le royaume de Sicile en 1154.

De nombreuses cités d’Italie méridionale, trop heureuses de se débarrasser des Normands (ou de recevoir de l’or byzantin.), ouvrirent alors leurs portes aux Byzantins, dont Bari, ancienne capitale du catépanat d’Italie.

 

Manuel I° s’allia alors avec la papauté, Adrien IV étant lassé des agissements agressifs des Normands. Cependant, le fossé séparant les Eglises de Rome et de Constantinople était trop important pour imaginer la fin du schisme et la mise en place d’une union.

Par la suite, malgré les succès initiaux, les Byzantins ne surent profiter de leurs acquis. Michel Paléologue, le commandant des forces grecques, s’attira les foudres de ses alliés latins à cause de son comportement. Peu de temps après, il fut rappelé à Constantinople, privant les Byzantins de l’expérience d’un homme de terrain.

En 1154, Roger II mourut et laissa le trône à son fils Guillaume I° le Mauvais. Ce dernier combattit alors les Byzantins qui tentaient de s’emparer de Brindisi. Suite à l’échec de la prise de Brindisi, les mercenaires byzantins désertèrent, et les Grecs décidèrent donc de quitter l’Italie.

Par la suite, Guillaume I° fit la paix avec Byzance, mais s’en prit par la suite au pape. Ce dernier, reconnaissant le nouveau roi de Sicile en 1156, s’allia alors aux Normands contre Frédéric Barberousse.

Innocent II confère le titre de roi de Sicile à Roger II, XVI° siècle, musée du Vatican. 

 

c) Manuel I°, Chypre et Antioche : en 1158, le prince d’Antioche, Renaud de Châtillon (il avait épousé Constance suite à la mort de Raymond de Poitiers.), décida de lancer un assaut sur l’île de Chypre, possession byzantine. Aidé de Thoros II, roi de Cilicie, les Latins parvinrent à faire céder aisément les défenses de l’île, puis ils massacrèrent et mutilèrent les habitants.

Manuel I° décida de réagir fermement. Il envahit la Cilicie, provocant alors la fuite de Thoros II, puis progressa jusque sous les murailles d’Antioche.

Baudouin III, roi de Jérusalem, qui avait épousé Théodora Comnène (la nièce de Manuel I°.), décida de ne pas porter secours à Renaud de Châtillon. Ce dernier décida alors de s’humilier, se présentant pieds nus et la corde au cou devant l’Empereur byzantin. Manuel I° accepta de le pardonner, à la condition qu’Antioche devienne vassale de Constantinople.

 

Peu de temps après, l’Empereur byzantin parvint à s’emparer de l’Isaurie, une région située au nord de la Cilicie.

 

d) L’expédition d’Egypte (1162 à 1169) : en 1162, après avoir négocié une alliance avec les souverains de Jérusalem et d’Antioche (Manuel I° épousa alors Marie d’Antioche, fille du roi de Jérusalem Amaury I°.), il fut décidé de mettre en place une expédition contre l’Egypte.

Cette province, qui avait appartenu aux Byzantins jusqu’à la conquête musulmane du VII° siècle, avait toujours été une terre riche (au cours de l’Empire romain, l’Egypte avait été un véritable grenier à blé, au même titre que l’Afrique du nord.).

Manuel I° envoya alors une importante flotte de guerre, mais les provisions de cette dernière furent épuisées alors que les Latins n’étaient pas encore prêts.

L’expédition fut donc un échec.

 

e) La bataille de Myriokephalon (1176) : depuis sa victoire contre les troupes de Kilich Arslan II (fils de Masud I°.) en 1161, l’Empire byzantin était en paix avec le sultanat de Rum.

Cependant, cette trêve était précaire, et les Turcs décidèrent de la rompre en 1175. Manuel I° décida alors de marcher sur Iconium (l’actuelle Konya.), la capitale du sultanat de Rum.

Disposant ses troupes en une longue colonne, Manuel I° arriva bientôt à l’entrée du défilé de Myriokephalon. Une ambassade turque se trouvait là, lui proposant de faire la paix. L’Empereur refusa, et s’engagea dans le défilé.

N’ayant pas fait reconnaître la route par ses éclaireurs, ce qui devait arriver arriva : les Seldjoukides lancèrent une attaque surprise contre les Byzantins.

Manuel I°, ayant perdu beaucoup d’hommes, son matériel de siège étant détruit, dut alors se résoudre à faire la paix avec Kilich Arslan II (l’Empereur s’engagea à démanteler les forts de Dorylaeum et Siblia, mais ne tint pas sa parole, considérant que les Turcs n’avaient pas tenu la leur au cours des années précedentes.).   

 

La défaite de Myriokephalon, même si elle fut moins grave que celle de Manzikert, eut cependant un profond impact psychologique. Au final, l’Empire byzantin, même s’il ne cessa jamais de combattre les Turcs, ne parvint jamais à récupérer l’Anatolie.

 

f) Guerres balkaniques (1150 à 1180) : Manuel I°, au cours de son règne, lutta aux quatre coins de son Empire (Asie mineure, Italie, Egypte, etc.). Cependant, le conflit le plus long eut lieu dans les Balkans, contre les Serbes et les Hongrois insurgés.

En 1152, Manuel I° fit jurer serment de fidélité aux Serbes, et parvint à vaincre les Hongrois, après deux longues campagnes (1151 à 1153 et 1163 à 1168.). Ainsi, l’Empire byzantin parvint à s’emparer de la Dalmatie. Le futur roi Béla III fut alors emmené à la cour de Constantinople, et fut fiancé à Marie, fille de Manuel I°. L’engagement fut cependant rompu en 1169 par l’Empereur, suite à la naissance de son fils Alexis II Comnène (qu’il avait eu avec sa deuxième épouse, Marie d’Antioche.).

 

g) L’Empire byzantin sous Manuel I° : sous le règne de cet Empereur, Constantinople tenta de faire disparaître les blessures passées, causées par des années de guerre civiles. Les cités de l’Empire furent prospères, et la capitale dépassa les 500 000 habitants (Constantinople était alors la plus grande cité d’Europe.).

 

Les critiques que l’on peut formuler à l’encontre de Manuel I° concernent les expéditions d’Egypte et d’Italie. Ces deux aventures coutèrent beaucoup d’argent à l’Empire, pour un résultat quasiment nul. De ce fait, si l’Empereur n’avait pas dépensé d’importantes sommes dans ces expéditions, peut être aurait il pu affronter les Turcs plus efficacement ?

L'Empire byzantin à la mort de Manuel I° Comnène, en 1180 (vous pouvez faire un "clic droit" sur la carte afin de faire un zoom).

Manuel I° mourut en 1080.

 

            4° Alexis II Comnène (1180 à 1183) – Né en 1169, Alexis II monta sur le trône à la mort de son père, en 1180. Encore trop jeune pour gouverner, ce fut sa mère Marie d’Antioche qui exerça la régence.

Cependant, cette dernière était d’origine latine, ce qui ne plut pas aux habitants de Constantinople. En outre, elle nomma Alexis (un neveu de Manuel I°.) comme conseiller, ce qui fut très mal vu car ce dernier était lui aussi très favorable aux Latins.

Peu de temps après son accession au trône, Alexis II épousa Agnès de France, fille du roi Louis VII.

 

C’est ainsi que des révoltes éclatèrent, menées par Marie, la demi-sœur d’Alexis II. Ces révoltes furent matées en 1182, mais c’est alors qu’Andronic Comnène (il était le fils d’Isaac, frère de Jean II Comnène.) décida d’intervenir.

Levant une armée, il affronta et vainquit les hommes du conseiller Alexis à la bataille de Nicomédie, et rentra ensuite dans la capitale. Le gouvernement fut renversé, la population acclama le nouveau venu, et massacra les marchands Latins de Constantinople (les quelques survivants qui parvinrent à s’échapper pillèrent les côtes grecques en retournant en Occident.).

Par la suite, Andronic fit assassiner Marie d’Antioche, ainsi que Marie Comnène, et énucléa le conseiller Alexis.

En 1183, Andronic décida aussi de se débarrasser d’Alexis II, qu’il fit étrangler (il épousa alors Agnès de France, la veuve d’Alexis II, âgée de douze ans.).

 

Jusqu’à présent, il existait des inimitiés entre Grecs et Latins, mais les deux partis parvenaient cependant à s’entendre. Suite au massacre de 1183, les relations se dégradèrent terriblement, entrainant la prise de la ville par les soldats de la quatrième croisade en 1204.

 

            5° Andronic Comnène (1183 à 1185) – Né en 1123, Andronic Comnène n’avait jamais régné. Ce dernier avait été emprisonné après s’être révolté contre l’Empire byzantin, puis avait mené une vie d’errance en Terre sainte.

Pièce de monnaie à l'effigie d'Andronic Comnène (il est accompagné par le Christ, à droite.).

 

a) Politique intérieure : une fois au pouvoir, Andronic décida de mettre en place de nombreuses réformes. Il supprima la vénalité des charges, interdit de lever arbitrairement des impôts, etc. L’objectif était de protéger les sujets les moins fortunés de l’Empire et de mettre un terme à la corruption de l’administration.

De ce fait, les nobles n’acceptèrent pas ces réformes, et décidèrent de se révolter. Andronic décida donc de faire régner la terreur à Constantinople afin de se faire respecter, mais il s’attira ainsi l’inimitié de son peuple.

 

b) Politique extérieure : détestant les Latins, Andronic décida de s’allier à Saladin, sultan de Syrie et d’Egypte, s’engageant à détruire les Etats croisés.

Cependant, l’Empereur dut alors répondre aux attaques du roi de Sicile Guillaume II le Bon, qui avait succédé à son père Guillaume I° le Mauvais.

Guillaume II couronné par le Christ, mosaïque de la cathédrale de Monreale, Monreale, Sicile.

Ce dernier tenta de trouver une alliance contre les Byzantins en donnant en 1184 à Henri VI, fils de Frédéric Barberousse, la main de sa tante Constance (cette dernière était l’héritière du royaume de Sicile, Guillaume II n’ayant pas d’enfants.).

En 1185, Guillaume II parvint à s’emparer de Corfou, de Durazzo et de Thessalonique (la deuxième ville de l’Empire.).

 

La nouvelle provoqua des émeutes dans Constantinople, et la foule mécontente proclama Empereur Isaac Ange, un cousin d’Andronic Comnène. Ce dernier, arrêté par la population, fut humilié, mutilé, torturé et exécuté.

La mort d'Andronic Comnène, par Boccace, enluminure issue de l'ouvrage de casibus, France, XV° siècle, bibliothèque nationale de France.

 

Sa mort mit fin à la dynastie des Comnènes.

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[1] Pour en savoir plus sur Isaac Comnène, voir le 1, section V, chapitre troisième, histoire de l’Empire byzantin.

[3] Après avoir chassé Henri IV de Rome en 1084, les Normands pillèrent la ville pour la cinquième fois de son histoire.

[7] A l’origine, atabeg était un titre de noblesse signifiant ‘père du prince’, conféré aux dignitaires chargés d’exercer la régence lors d’une vacance du pouvoir. Par la suite, dans le courant du XI° siècle, de nombreux atabeg conservèrent le pouvoir à vie, fondant ainsi de nouvelles dynasties.

[8] Pour en savoir plus sur le couronnement de Frédéric Barberousse, référez vous au 2, section II, chapitre troisième, l’Empire germanique et l’Eglise.

 
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