Les croisades (1095 -
1270) et la colonisation franque en Orient
CHAPITRE
PREMIER :
Les croisades
II : Deuxième croisade (1147 – 1148) |
1° Causes de la
deuxième croisade –
Sous le règne de Godefroi, le royaume de Jérusalem fut prospère. Mais ce
dernier mourut en 1100, en ayant à peine le temps d’organiser son Etat. Ses
successeurs furent le frère et le cousin du défunt : Baudouin de Boulogne et
Baudouin du Bourg.
Ensemble, ils firent de nouvelles
conquêtes, emportant Césarée, Beyrouth, Sidon, Tyr, Byblos et toute la Syrie
(sauf Damas.). Après le temps des victoires, vint le temps des discordes
entre les deux cousins. Ainsi, les musulmans commencèrent à s’enhardir. Leur
succéda ensuite Baudouin II, puis Foulques d’Anjou, qui à sa mort laissait
la couronne à un enfant de treize ans.
C’est alors qu’apparut l’Atâbeg
Zengi (fondateur de la dynastie des Zengides.), qui avait
assis son autorité sur Alep et Mossoul. Proclamant le djihad, la
‘guerre sainte’, il marcha sur Edesse (Le roi Jocelin de Courtenay était
mort, et c’était son fils, Jocelin II, qui était à la tête du royaume.).
Zengi s’empara de la ville en
1144. La cité fut pillée et les habitants massacrés, alors que l’Atâbeg ne
voulait pas de violences. En effet, ce dernier souhaitait conserver les
intérêts commerciaux de la ville. D’autre part, Zengi fut plein d’égards
pour le clergé syriaque et arménien, mais n’empêcha pas le massacre des
latins présents dans Edesse.
Le 14 octobre 1146, Zengi fut tué
par ses pages, et ses deux fils, Ghâzi et Nour ed Dîn, prirent
le pouvoir. C’est à ce moment là que les Arméniens vivant à Edesse, de peur
d’être persécutés par ces nouveaux chefs, décidèrent d’ouvrir les portes de
la ville à leur ancien roi, Jocelin II. Ce dernier, accompagné par ses
hommes, pénétra dans la ville, et massacra la garnison turque.
Cependant, ces derniers parvinrent à conserver la citadelle. Autre problème,
une autre armée turque vint stationner devant la ville. Jocelin II, coincé
entre la citadelle et l’armée de renfort, décida de faire une sortie
(accompagné par les Arméniens, qui n’avaient plus rien à perdre.). La charge
de Jocelin II et de ses hommes fut un carnage, ils furent massacrés par les
musulmans. L’on estime que seul un quart des chevaliers survécurent.
La perte d’Edesse affaiblissant
les acquis qu’avaient obtenu les Francs en Terre Sainte, le pape Eugène
III décida une nouvelle croisade, dont il confia la prédication à Saint
Bernard, abbé de Clervaux.
2° Prédication de
la croisade, Vézelay et Spire (1146) – Le choix du pape ne pouvait être
plus heureux, Saint Bernard étant un homme qui jouissait à l’époque d’une
influence considérable. Il prêcha d’abord à Vézelay (près de Nevers.), puis
en Bourgogne (au printemps 1146.).
Saint Bernard prêchant la seconde
croisade, par A. DE NEUVILLE, gravure issue de l'ouvrage Histoire de
France, par Guizot.
Sa parole enflammée eut un grand
succès. Toute la chevalerie demanda la croix avec son roi Louis VII,
et même l’épouse de ce dernier, Aliénor, voulut être de la partie. Le
ministre du roi, Suger, tenta de dissuader le roi de partir, sans
succès.
Louis VII prend la croix à Vézelay, par Sébastien MAMEROT, enluminure issue
de l'ouvrage Les Passages d'outremer faits par les François contre les
Turcs depuis Charlemagne jusqu'en 1462, France, 1475, Bibliothèque Nationale
de France.
L’enthousiasme fut aussi grand à Spire, où
Saint Bernard prêcha la même année. L’Empereur Conrad III lui même
voulut prendre la croix.
3° La II°
Croisade, Conrad III – L’Empereur partit le premier, en 1147, à la tête
d’une armée de plusieurs dizaines de milliers d’hommes. Les croisés
descendirent vers le Bosphore, par la route traditionnelle du Danube.
Conrad III pensait compter sur
l’aide de l’Empereur de Constantinople, Manuel Comnène, qui avait
épousé sa sœur Berthe. Cependant, les croisés commettant de nombreuses
dégradations dans les territoires traversés, les Byzantins ripostèrent. En
outre, Conrad III refusant de prêter hommage à Manuel Comnène, ce dernier
décida de faire la paix avec les musulmans afin de protéger ses arrières.
A Constantinople, les Byzantins
n'accueillirent pas les croisés avec courtoisie. Les sources affirment que
les Grecs refusèrent tout d’abord de donner des vivres aux croisés, ou bien les
vendirent à un prix exorbitant. Certains chroniqueurs nous informent que les
byzantins auraient mélangé de la chaux à la farine, tuant de nombreux
chevaliers.
L'arrivée des croisés à Constantinople, par Jean Fouquet, enluminure issue
de l'ouvrage Grandes chroniques de France,
Paris, France, XV°siècle (à noter que l'illustrateur à représenté Louis VII
et Conrad III arrivant ensemble dans la ville, ce qui n'eut pas lieu.).
Finalement, Conrad III et son
armée se rendirent en Asie Mineure, sous la direction de guides byzantins.
Ces derniers engagèrent les occidentaux dans des défilés inextricables, puis
disparurent, le 25 octobre 1147. Le lendemain, alors que les Allemands
étaient en train de rétrograder, ils furent attaqués par une armée ennemie.
Ces derniers, refusant d’engager le corps à corps, attaquaient les croisés à
distance, grâce à leurs arcs.
Les croisés parvinrent tant bien que mal à
regagner Nicée, où se trouvaient les Français. Les Allemands avaient
cependant perdu beaucoup d’hommes,
et même Conrad III était blessé.
4° La II°
Croisade, Louis VII – Les Français, eux aussi, s’étaient heurtés aux
Grecs. Manuel Comnène avait demandé au roi Louis VII que les chevaliers qui
l’accompagnaient lui prêtent hommage.
Louis VII part en croisade, enluminure issue de l'ouvrage Grandes
Chroniques de France, Paris, France, XIV°siècle.
Sa demande fut rejetée, et
l’évêque de Langres, qui accompagnait le roi, encouragea même les croisés à
punir les Byzantins et à donner l’assaut contre Constantinople. Il ne fut
cependant pas écouté.
5° Victoire du
Méandre et Désastre d’Attalia (1148) – En Asie Mineure, les Français
décidèrent de ne pas passer par la Phrygie, mais de suivre la route du
littoral, afin de pouvoir s’approvisionner plus facilement (ils traversèrent
les provinces byzantines de Lydie, Ionie, Pisidie et Pamphylie.).
Les croisés
s’engageaient dans les gorges de Pisidie, afin de rejoindre Attalia.
Mais l’avant-garde de l’armée française s’était trop avancée par rapport au
reste des troupes, et les musulmans en profitèrent pour couper l’armée en
deux. Ces derniers firent beaucoup de victimes dans les rangs des croisés.
La chronique raconte que Louis VII, au cours de la bataille, isolé, monta
sur un rocher afin de surplomber ses ennemis. Puis, qu’il coupa tant de bras
et de têtes que les musulmans décidèrent de battre en retraite.
Cavalier (peut être Louis VII ?) écrasant un Sarasin, copie d'une peinture
de la chapelle des Templiers à Cressac, XII° siècle, Cité de l'architecture,
Paris.
Finalement, les croisés
parvinrent à atteindre Attalia, une ville grecque sous la domination des
Comnène, dont les habitants refusèrent d’ouvrir leurs portes aux croisés.
Outrés, ces derniers, manquant
d’eau et de vivres, à la merci des Turcs qui infestaient le voisinage,
décidèrent d’assiéger la ville.
Le gouverneur de la ville décida
alors d’offrir des navires aux croisés afin de les emmener à Antioche. On
décida de transporter les troupes en deux temps : une flotte serait
consacrée aux cavaliers, l’autre aux piétons. Une première flotte arriva
donc, destinée à embarquer les cavaliers. Puis une seconde se présenta, mais
ses vaisseaux étaient trop petits et en quantité insuffisante ; l’armée
seule put s’embarquer, laissant derrière elle la foule des pèlerins qui la
suivaient. Louis VII dut les confier au gouverneur contre une forte somme
d’argent, et une fois les chevaliers partis, ce dernier ne respecta pas sa
parole. Laissés sans défense, tous furent massacrés par les musulmans.
6° Louis VII à
Antioche, à Jérusalem, à Damas (1148) – Pendant que les pèlerins se
faisaient hacher menu par les Turcs, les chevaliers français arrivaient à
Antioche, en mars 1148. Ils y oublièrent, au sein des plaisirs, le but de
leur voyage. C’est ainsi que la reine Aliénor se signala pour son goût pour
les fêtes. Elle se plaisait à la cour d’Antioche et auprès de son oncle
Raymond VII de Poitiers. Cette dernière ne parlait plus de partir,
souhaitant se séparer de son mari afin d’épouser son oncle.
Raymond VII demanda à Louis VII
de l’aider à prendre Alep, ville où vivait Nour ed Dîn, son plus dangereux
adversaire. Mais ce dernier ne voulut pas être détourné de la croisade. Les
chroniqueurs nous informe que Raymond VII se mordit les doigts de constater
que Louis VII avait une telle étroitesse de vue.
Finalement, le roi de France,
fatigué par ces désordres et pressé d’arriver à Jérusalem, emmenât sa femme
de force avec lui, ce qu’elle ne lui pardonna pas.
Dans la ville sainte, le peuple
fit à Conrad III et Louis VII une réception triomphale. C’est alors que la
reine Mélisende demanda aux deux souverains d’aller attaquer Damas,
une des villes saintes de l’islam. Accompagnés de l’armée de Jérusalem, ils
mirent le siège devant la ville le 24 juillet 1148.
Le siège de Damas par les croisés, par Sébastien MAMEROT, enluminure issue
de l'ouvrage Les Passages d'outremer faits par les François contre les
Turcs depuis Charlemagne jusqu'en 1462, France, 1475, Bibliothèque Nationale
de France.
Aux yeux des croisés, l’idée
était bonne : la possession de Damas, appelée la perle de l’Orient,
permettrait d’assurer les possessions de la Syrie franque. Mais, après
quelques jours de siège, plutôt favorables aux chrétiens, ces derniers
décidèrent de se retirer, le 28 juillet 1148. Pourquoi ? Une des
explications viendrait du fait que les Damasquins (les habitants de Damas.)
étaient les alliés du roi de Jérusalem, Foulques. Une autre explication
viendrait du fait que Louis VII ait annoncé son intention de faire d’un de
ses hommes le futur seigneur de Damas, écartant les barons de Jérusalem, qui
n’auraient pas apprécié.
Sur le chemin du retour, les
rivalités entre les croisés et les chevaliers de Jérusalem ne firent que
croître. Les premiers considérant les orientaux comme des traîtres,
disant qu’ils étaient à moitié musulmans. Les autres reprochaient aux
occidentaux de n’être en Terre Sainte que pour vouloir massacrer du
Sarasin, sans faire de distinction entre alliés et ennemis.
Ces derniers abandonnèrent
l’entreprise, et Conrad III rentra en Europe avec ses hommes.
Louis VII resta encore une année
en Terre Sainte, ne voulant pas se résoudre à la quitter sans avoir rien
fait. Il ne rentra en France que sur les pressantes prières de Suger.
La deuxième croisade
se terminait par un échec. La principale cause de cet échec étant
l’imprévoyance des deux souverains, qui furent incapables de s’organiser
afin de monter une expédition cohérente. Autres facteurs qui jouèrent lors
de cette II° croisade : le double jeu mené par les Grecs et les désordres au
sein de l’armée (à Antioche surtout.).
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