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Mythologie
 
 

 

 

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La troisième république (1870 - 1945)

CHAPITRE QUATRIEME : La Première Guerre mondiale

(août 1914 à novembre 1918)

 

II : 1914, la guerre de mouvement

           

            1° La mobilisation et la déclaration de guerre (août 1914) – Comme nous l’avons vu précédemment, la Russie décréta la mobilisation générale le 30 juillet 1914, imitée le 1er août par l’Allemagne et la France.

 

a) L’opinion française et la guerre : contrairement à une idée reçue, la première guerre mondiale ne fut pas une guerre de revanche. L’Alsace et la Lorraine avaient été perdues 44 années auparavant, et la grande majorité des Français ne se souciait plus guère de ces territoires perdus.

Par contre, l’on retrouvait aux extrêmes des nationalistes et des revanchards, partisans de la guerre ; à l’autre bord de l’échiquier politique, syndicalistes et anarchistes étaient opposés au conflit, considérant que la lutte ne devait pas s’opérer entre les peuples mais contre la bourgeoisie.

 

Début août 1914, la grande majorité des Français était préoccupée par la moisson, récolte des céréales effectuée au cours de l’été. Ce fut donc bon gré mal gré que les appelés se rendirent dans les gares, lieu de rassemblement des mobilisés.

Une rue de Paris, le jour de la mobilisation, Le Monde Illustré, 15 août 1914.

Cette mobilisation s’opéra dans de bonnes conditions (l’on constata même plusieurs manifestations d’enthousiasme.), de nombreux soldats considérant que la guerre serait courte (l’Etat-major constata seulement 1.5% de défections.).

Carte postale humoristique, 1914, musée des Invalides, Paris.

 

b) L’Union sacrée : à Paris, Raymond Poincaré proclama l’Union sacrée le même jour, alliance de tous les partis politiques français, des syndicats et des différents courants religieux[1].

Ainsi, le Carnet B[2], recensant les noms des leaders syndicalistes, anarchistes et révolutionnaires ne fut pas utilisé. En outre, de nombreux prêtres décidèrent de participer au conflit ; la CGT, bien que syndicat anarchiste et révolutionnaire, se rallia à l’Union sacrée.

 

A noter que les autres pays de la Triple-Entente[3] ou de la Triplice mirent en place eux aussi une procédure d’union, comme en Angleterre, en Russie ou en Allemagne (la Burgfrieden[4].).

 

            2° L’invasion de la Belgique, première phase du plan Schlieffen (août 1914) – Ayant déclaré la guerre à la Russie le 1er août, l’Empereur Guillaume II ordonna l’invasion du Luxembourg dès le lendemain. Le souverain germanique envoya alors un ultimatum à la Belgique, lui réclamant le droit de passage.

Cependant, comme Albert I°, roi des Belges, ayant refusé de se soumettre, l’Allemagne déclara la guerre à la Belgique et à la France le 3 août.

Albert I°, roi des Belges, Le Monde Illustré, 15 août 1914.

Appliquant le plan Schlieffen, le général Helmuth Johann Ludwig von Moltke[5] décida donc d’envahir la Belgique dès le lendemain.

Le général Helmuth von Moltke.

A noter toutefois que l’Angleterre décida de prendre part au conflit le 5 août, ayant averti qu’elle déclarerait la guerre à l’Allemagne et apporterait son soutien à la France, si Guillaume II ordonnait l’invasion de la Belgique.

 

L’Etat-major allemand, sûr de sa supériorité militaire, constata avec surprise une forte résistance autour de la ville fortifiée de Liège.

Afin de réduire à néant les défenses ennemies, les Allemands firent sauter les forts belges en utilisant l’artillerie lourde, dont la Grosse Bertha[6], un obusier de 420 mm.

La "Grosse Bertha".

Suite à la reddition des Liégeois, le 16 août, l’Etat-major allemand ordonna l’exécution de  plusieurs centaines de civils, coupables d’avoir porté les armes contre le Reich (des prisonniers belges eurent les mains coupées afin de les empêcher de se battre.).

Ces exactions eurent une importante répercussion lors de la Grande guerre. En effet, la propagande alliée n'hésita pas à rappeler à ses soldats les massacres commis en Belgique, présentant le "boche" comme un monstre sanguinaire.

Affiche publicitaire présentant l'exposition "Souvenez-vous", consacrée aux crimes allemands, 1917, musée des Invalides, Paris.

 

            3° La bataille des frontières (10 au 28 août 1914) – Alors que les soldats allemands pénétraient en Belgique, l’Etat-major français, conformément au plan XVII, se dirigeait vers l’Alsace et la Lorraine.

 

a) Une offensive française qui ne porte par ses fruits en Alsace (10 août 1914) : l’objectif de l’Etat-major français était de passer par le territoire de Belfort, en direction de Colmar, puis de couper les ponts après avoir traversé le Rhin.

Pour mener cette offensive française sur l’Alsace, l’on retrouvait la I° Armée, commandée par le général Auguste Dubail[7] ; ainsi que la VII° armée (ou Armée d’Alsace.), formée le 10 août à partir du 7° Corps d’Armée (prélevé à la I° Armée.), commandée par le général Paul Pau[8].

Les généraux Auguste Dubail et Paul Pau.

 

Ainsi, le 7° Corps parvint à prendre Mulhouse le 7 août, mais une contre-attaque allemande le contraignit à se replier sur Belfort. Le 10 août, la VII° armée tenta une nouvelle offensive sur Mulhouse, mais celle-ci fut un échec.

Colonel de l'Etat-major particulier de l'Infanterie, 1914, musée de l'Infanterie, Montpellier.

Suite à ces revers, la VII° armée fut coupée en deux : le 7° Corps fut envoyé à Amiens afin de former la VI° Armée ; les éléments restant s’établirent sur une ligne Col du Bonhomme-Belfort, avec pour mission de garder la ligne de crête des Vosges[9].

 

b) Une offensive française qui ne porte par ses fruits en Lorraine (19 au 20 août 1914) : alors que la VII° armée combattait en Alsace, la I° Armée et la II° Armée (commandée par le général Noël Edouard, vicomte de Currières de Castelnau[10].), avaient pour mission de marcher sur Sarrebruck sur deux axes, Sarrebourg et Morhange, puis de s’installer sur la Sarre en attendant le succès de l’offensive française de débordement sur le Luxembourg (opérée par les III° et V° Armées.).

Le général Noël Edouard de Castelnau.

 

A la mi-août, la I° Armée marcha sur Sarrebourg, alors que la II° Armée se dirigeait vers Morhange. A noter en outre qu’une Armée de Lorraine[11] fut constituée au même moment afin de protéger Metz.

 

Après une semaine de marche, et ayant pénétré d’une vingtaine de kilomètres en territoire allemand, la II° armée rencontra les troupes ennemies, commandées par le kronprinz[12] Rupprecht, fils aîné de Louis III, roi de Bavière.

Le kronprinz Rupprecht de Bavière.

Les mitrailleuses allemandes, repérant de loin les soldats français équipés de pantalons garance, causèrent d’importants dégâts. La Bataille de Morhange, livrée du 19 au 20 août, fut une défaite pour la II° armée, qui fut contrainte de reculer vers Lunéville, Saint-Nicolas-de-Port et le Grand-Couronné (une hauteur située à l’est de Nancy.).

L’on estime que les deux camps perdirent 8 000 hommes lors de l’affrontement.

 

La I° Armée, quant à elle, ne tarda guère à rencontrer l’ennemi, établi en position défensive sur les hauteurs de la Sarre. La bataille de Sarrebourg (20 août 1914.), nouvel échec pour les forces française, contraignit la I° Armée à se replier d’une quinzaine de kilomètres.

Cependant, craignant d’être débordé à l’ouest suite au revers de la II° Armée, le général Dubail décida de reculer vers Blâmont.

 

c) La contre-attaque du kronprinz, la trouée de Charmes (22 au 26 août 1914) : le kronprinz Rupprecht, ayant réussi à repousser les I° et II° Armées, était satisfait de sa position défensive. Cependant, ce dernier reçut un message du général von Moltke, lui ordonnant de se mettre en marche.

Ainsi, l’objectif de l’Etat-major allemand était de faire marcher le kronprinz vers la trouée de Charmes, un espace vide de fortifications, situé entre Toul et Epinal. Ce dernier devait ensuite contourner Verdun afin de marcher plein nord en direction de Bar-le-Duc, afin de prendre les IV° et V° Armées à revers.

 

Le kronprinz, à la tête des VI° et VII° Armées, décida donc de franchir la frontière le 22 août.

Le général de Castelnau, ayant appris que les Allemands étaient en marche grâce à des informations transmises par des aviateurs français, se trouvait dans une position délicate.

Afin de renforcer ses troupes, il demanda au général Dubail de lui céder le 8° Corps, qui vint grossir la II° Armée.

 

La ligne de front, s’établissant du Grand-Couronné à Ménarmont, fut le théâtre de durs combats entre les deux belligérants.

Les Allemands furent surpris de la capacité de résistance de la II° Armée, qu’ils considéraient comme anéantie suite à la bataille de Morhange.

Le général de Castelnau, quant à lui, s’aperçut dans la journée du 24 août que le kronprinz, tentant coûte que coûte à s’engouffrer dans la trouée de Charmes, commençait à dégarnir ses flancs.

Les Français, attaquant l’aile gauche et l’aile droite ennemie, parvinrent à faire reculer les Allemands de quelques kilomètres. Par ailleurs, malgré les efforts du kronprinz, le centre français ne recula pas, barrant à l’ennemi le passage vers la trouée de Charmes.

   

Les combats cessèrent en soirée, mais Castelnau profita toutefois de l’obscurité pour installer ses canons à portée de tir du centre allemand.

Dans la journée du 25 août, les Allemands furent contraints de reculer, au centre et à l’est.

 

Le lendemain, Castelnau poursuivit son offensive, chargeant le 20° Corps, commandé par le général Ferdinand Foch, de repousser les Allemands du Grand-Couronné, au nord-ouest.

Au soir du 26 août, considérant sa position comme mauvaise, Rupprecht de Bavière décida de sonner la retraite.

 

d) Nouvelle offensive du kronprinz, batailles du Grand-Couronné et de la Haute-Meurthe (fin août à mi-septembre 1914) : bien que quelque peu découragé suite à son échec lors de la bataille de la trouée de Charmes, Rupprecht de Bavière reçut de nouvelles instructions à la fin août 1914.

Ainsi, ce dernier reçut l’ordre de marcher sur Nancy, occupée par les Français, où il serait rejoint par l’Empereur Guillaume II en personne.

 

Se mettant en marche début septembre, le kronprinz entreprit le siège de la cité dès le 4 septembre. 

La ville était défendue par la II° Armée du général Castelnau, qui avait été contraint de se séparer de plusieurs divisions afin de renforcer la III° Armée, en difficulté à l’ouest.

 

Les Allemands, bombardant Nancy et les villages avoisinant, furent cependant contraints de se retirer le 13 septembre, évacuant Pont à Mousson et Lunéville. Castelnau ordonna à ses troupes de progresser jusqu’à la Seille, un affluent de la Moselle.

 

A noter qu’au même moment, en Haute Meurthe, la I° Armée du général Dubail parvint elle aussi à faire reculer les troupes allemandes.

Grâce à ces récentes victoires, le front de Lorraine, établi sur une ligne Nancy-Hautes Vosges, resta sensiblement le même jusqu’à la fin de la guerre.

 

            4° Les Français pris à revers, deuxième phase du plan Schlieffen (mi-août 1914) – Comme nous l’avons vu plus tôt, l’Etat-major allemand avait décidé d’envahir la Belgique afin de prendre l’armée française à revers, en application du plan Schlieffen.

 

a) La V° Armée tient bon en Belgique : l’annonce du viol de la neutralité de la Belgique contraignit le général Joffre à revoir l’application du plan XVII.

Ainsi, ce dernier ordonna à la V° Armée (commandée par le général Charles Louis Lanrezac[13].) de marcher vers la Belgique, s’établissant le long de la vallée de la Sambre et de la Meuse, entre Dinant et Charleroi.

Le général Charles Louis Lanrezac.

Au même moment, sur l’aile gauche de l’armée française, l’on retrouvait le Corps expéditionnaire britannique[14], installé dans la région de Mons.

Plus au nord, les soldats belges, en liaison avec les Français, était chargés d’opérer sur les flancs de l’ennemi.

C’est ainsi que les Belges, établis sur la rivière Gette, parvinrent à repousser une avant-garde allemande le 12 août, lors de la bataille des casques d’argent[15]. L’affrontement se déroula non loin de Halen, une cité située au nord ouest de Liège.

 

b) La IV° Armée recule dans les Ardennes : cependant, alors que la IV° Armée, commandée par le général Fernand de Langle de Cary[16], se trouvait dans les Ardennes, dans la région de Neufchâteau, elle rencontra par surprise la III° Armée allemande.

Le général Fernand de Langle de Cary.

Les combats, livrés sur une ligne Gedinne-Florenville, à la pointe sur de la Belgique, tournèrent cependant à l’avantage des troupes allemandes. En effet, les Français, pris dans une forêt difficilement pénétrable, subirent d’importantes pertes et reçurent l’ordre de se retirer (22 août 1914.).

 

Suite à la surprise de Neufchâteau, le général de Langle de Cary s’installa à Sedan, où il fut attaqué dès le lendemain par les troupes allemandes (25 août 1914.).

Les Français, s’appuyant sur leur artillerie, parvinrent à repousser l’ennemi pendant quelques jours. Cependant, des troupes allemandes ayant traversé la Meuse virent grossir les rangs des assaillants.

Finalement, après quelques jours de combats, le général Joffre ordonna à la IV° Armée de battre en retraite (29 août 1914.).

 

            5° La Grande Retraite (fin août à début septembre 1914) – A la fin du mois d’août 1914, la situation ne tournait guère à l’avantage des Français.

Ainsi, hormis en Lorraine et dans les Vosges, où les II° et VII° Armées tenaient leurs positions (malgré l’échec du plan XVII.), le reste des forces françaises amorçaient un recul progressif face à l’ennemi.

Ainsi, les III° et IV° Armées s’étaient repliées derrière la Meuse ; la V° Armée, suite à la bataille de Charleroi (23 août 1914.), fut contrainte de reculer sur une ligne Hirson-Charleville[17].

 

Les Français évacuaient donc la Belgique, laissant le champ libre aux Allemands. Ces derniers, s’emparant de Bruxelles le 20 août, commirent de nombreuses atrocités sur les populations civiles[18], accusées de retarder la marche de l’armée.

La Grand-Place de Bruxelles, 1887, musée de la ville de Bruxelles, Bruxelles.

 

Le général von Molke, à la tête de l’Etat-major allemand, était convaincu que les Français, suite à leurs importantes pertes, n’étaient plus en état de se battre. C’est ainsi qu’il décida d’apporter quelques modifications aux plan Schlieffen : ainsi, von Molke envoya des renforts en Lorraine en vue d’une nouvelle attaque ; en outre, il deux corps de l’armée allemande furent envoyés en renfort sur le front est. 

 

a) Les batailles de Mons et du Cateau (23 au 26 août 1914) : constatant que les Français reculaient, le corps expéditionnaire anglais, commandé par le maréchal John French[19], fut contraint d’abandonner Mons suite à une attaque allemande (23 août 1914.).

Le maréchal John French, Le Monde Illustré, 15 août 1914.

 

Par la suite, les alliés traversèrent Maubeuge (qui capitula le 8 septembre 1914[20].), puis s’installèrent au Cateau. Ces derniers étaient suivis de près par les Allemands, qui lancèrent une offensive le 26 août 1914.

Les Britanniques, en infériorité numérique mais mieux entrainés que l’ennemi, parvinrent à remporter la victoire grâce à l’aide de la VI° Armée, commandée par le général Michel Joseph Maunoury[21].

Le général Michel Maunoury.

Les combats furent particulièrement violents, et les deux belligérants perdirent chacun 7 000 hommes environ.

Dans la nuit du 26 août, les alliées se retirèrent vers Saint Quentin.

 

b) La bataille de Guise (29 août au 2 septembre 1914) : le général Joffre, qui avait amorcé un important mouvement de recul, souhaitait toutefois protéger cette retraite en bon ordre.

Ainsi, la V° Armée du général Lanrezac reçut l’ordre de lancer une attaque sur le flanc de la II° Armée allemande, commandée par le général Karl von Bülow[22]. En effet, l’objectif de Joffre était de mettre en place une ligne d’arrêt située sur un axe Amiens-Reims-Verdun.

 

Lanrezac, s’établissant sur la rive sud-est de l’Oise, décida de lancer une offensive en deux temps. Ainsi, le 10° Corps fut chargé de bloquer la progression de la II° Armée allemande dans la région de Guise ; puis, les et 18° Corps reçurent l’ordre de lancer une offensive sur Saint Quentin, quelques kilomètres à l’ouest.  

 

Cependant, von Bülow avait été mis au courant de cette contre-attaque, grâce aux ordres retrouvés sur un officier capturé. Par ailleurs, le corps expéditionnaire anglais, stationné près de Saint Quentin, annonça qu’il n’était pas en mesure de participer à l’offensive ; le contact avec la IV° Armée, se trouvant quelques kilomètres à l’est, ne put se faire.

 

Ainsi, le 1° Corps lança une offensive sur Guise ; le 10° Corps fut chargé de repousser les Allemands de l’Oise, s’installant sur une ligne Sains-Lémé ; le 18° Corps, comme prévu, s’attaqua aux faubourgs de Saint Quentin.

 

Au final, l’offensive sur l’Oise fut un succès, et si l’attaque sur Saint Quentin ne fut qu’un demi-succès, elle contraignit les Allemands à mettre un terme à leur poursuite du corps expéditionnaire anglais.

La II° Armée allemande ayant été considérablement ralentie par cette opération, le général Alexandre von Klück[23], commandant la I° Armée allemande, fut contraint de modifier la marche du plan Schlieffen. Ainsi, alors qu’à l’origine il était prévu que la I° Armée déborde largement à l’ouest, von Klück décida de resserrer sa trajectoire vers l’est, afin d’éviter que les Français ne s’intercalent entre ses troupes et celles de von Bülow.

Alexandre von Klück et Karl von Bülow.

 

Le 30 août, estimant sa position menacée sur ses flancs, le général Lanrezac décida de se retirer, malgré les ordres de Joffre[24].

 

            6° L’offensive sur la Marne (fin août à mi-septembre 1914) – alors que la majorité des forces françaises (y compris le corps expéditionnaire anglais.) reculaient vers la Marne, Joffre décida de créer la IX° Armée (début septembre 1914.). Cette dernière était destinée à renforcer les troupes luttant contre les armées allemandes qui avançaient vers Paris.

 

a) Le gouvernement quitte Paris (26 août au 2 septembre 1914) : à cette date, la situation devenait critique, les plus anciens ayant souvenir du terrible siège de Paris, en 1870. D’autant plus que les Parisiens étaient laissés dans l’ignorance, l’Etat-major n’ayant pas communiqué sur la progression des armées allemandes.

 

Viviani, qui avait formé un nouveau ministère le 27 août (composé de Louis Malvy[25] à l’Intérieur, Théophile Delcassé[26] aux Affaire étrangères, Alexandre Millerand[27] à la Guerre, Aristide Briand[28] à la Justice, Alexandre Ribot aux Finances, et de Gaston Doumergue[29] aux Colonies.), décida de quitter Paris afin de se réfugier à Bordeaux.

Alexandre Millerand, Théophile Delcassé (Le Monde Illustré, 21 février 1914.), Gaston Doumergue et Alexandre Ribot.

 

 

Le gouvernement ayant évacué la capitale le 2 septembre, Viviani confia le contrôle de la cité au général Joseph Gallieni[30], gouverneur militaire de Paris.

Le général Gallieni, Le Monde Illustré, N° 3001, 26 juin 1915.

Ce dernier, ne disposant que de moyens très faibles, se prépara néanmoins à défendre la capitale face aux armées allemandes.

Affiche placardée sur les murs de la capitale par le gouvernement militaire de Paris, suite au départ du gouvernement, 1914, musée des Invalides, Paris.

 

b) La bataille de la Marne (5 au 13 septembre 1914) : début septembre 1914, trois armées allemandes marchaient vers Paris : la I° Armée du général von Klück (nord-ouest de Paris), la II° Armée du général von Bülow (plus à l’est, dans les marais de Saint Gond.), et la III° Armée du général Max von Hausen[31] (fixée par les IX° et IV° Armées près de Vitry.). La V° Armée allemande, quant à elle, ne visait pas la capitale, mais tentait de percer à Verdun afin de prendre les armées françaises à revers.

 

Le 2 septembre, des aviateurs français s’aperçurent que la I° Armée allemande inclinait vers l’est (en direction de von Bülow.), n’appliquant pas le plan Schlieffen qui prévoyait un encerclement de Paris par l’ouest.

 

Ainsi, dans l’après midi du 5 septembre, le général Joffre ordonna à la VI° Armée de s’installer sur une ligne partant de Nanteuil-le-Haudouin jusqu’à Meaux. Rencontrant la I° Armée de von Klück le 7 septembre, le général Maunoury reçut des renforts de Paris (afin de transporter rapidement les 10 000 hommes en garnison dans la capitale, Gallieni réquisitionna plus de 600 taxis parisiens.).

Taxi Renault G7, dit "taxi de la Marne", musée du Louvre, Paris.

 

Dans la journée du 9 septembre, une brèche s’ouvrit sur le front allemand. En effet, alors que von Klück était fixé par la VI° Armée du général Maunoury, von Bülow continuait sa progression dans les marais de Saint Gond.

Profitant de l’occasion, la V° Armée du général Louis Franchet d’Espérey[32] et le corps expéditionnaire britannique pénétrèrent dans la faille, attaquant les I° et II° Armées allemandes sur les flancs[33].

Bataille de la Marne, combat de Vitry.

 

Surpris par l’offensive française, et subissant d’importantes pertes, l’Etat-major allemand décida de sonner la retraite le 13 septembre. Les Allemands se replièrent vers l’Aisne, puis s’établirent dans le nord de la France.

Le front ouest (septembre 1914).

 

La bataille de la Marne, bien que s’achevant sur une victoire des alliés, coûta très cher aux vainqueurs : en effet, les Français eurent 80 000 tués et plus de 100 000 blessés, les Anglais, quant à eux, perdirent 1 700 hommes.

Côté allemand, l’heure n’était pas aux réjouissances, von Bülow et von Klück déplorant la perte de 250 000 hommes.

 

c) L’échec du plan Schlieffen (mi-septembre 1914) : les armées allemandes ayant été repoussées sur la Marne, le plan Schlieffen, qui prévoyait une victoire rapide, était donc un échec.

Ainsi, le général von Moltke, qui considérait que la guerre était perdue, fut limogé de l’Etat-major et remplacé par le général Erich von Falkenhayn[34], un favori de Guillaume II.

Le général Erich von Falkenhayn.

 

Cependant, si les Français avaient remporté la bataille, ils ne purent exploiter leur avantage. En effet, ces derniers étaient trop épuisés pour poursuivre l’ennemi, laissant les Allemands s’installer sur de solides positions défensives.

 

            7° La course à la mer, dernière phase de la guerre de mouvement (mi-septembre à décembre 1914) – A l’automne 1914, Français comme Allemands constataient avec effarement que le conflit, qu’ils pensaient remporter rapidement grâce à la tactique de l’offensive à outrance, s’enlisait peu à peu dans une guerre de position.

 

a) La bataille de l’Aisne (13 au 28 septembre 1914) : Joffre, souhaitant profiter de la récente victoire de la Marne, ordonna aux V° et VI Armées d’attaquer le flanc ouest allemand, alors en cours de repli, entre l’Oise et l’Aisne.

L’initiative, soutenue par le corps expéditionnaire britannique, n’apporta cependant pas les résultats escomptés.

Ainsi, non content de tenir leurs positions, les Allemands contre-attaquèrent sur Verdun et en Argonne. Ces derniers échouèrent, mais parvinrent toutefois à avancer jusqu’à Saint-Mihiel, capturant un petit saillant qui mit entre leur main la voie ferrée et le canal permettant de ravitailler Verdun.

Prise de Vermilly, 14 octobre 1914, par Georges SCOTT, musée de l'Infanterie, Montpellier.

 

A l’issue de la bataille de l’Aisne, von Falkenhayn, nouveau chef d’Etat-major, élabora une nouvelle stratégie. L’objectif était de déborder les alliés sur leur flanc gauche, en direction de la mer, afin de prendre les principaux ports français sur la Manche, tels que Calais et Dunkerque (et donc priver les Anglais de leurs bases d’approvisionnement, les contraignant de facto à déposer les armes.).

 

b) Les alliés prennent position, de l’Oise à la mer du Nord (fin septembre à mi-octobre 1914) : soucieux de ne pas se faire déborder sur son flanc gauche, Joffre décida d’adapter le positionnement des forces françaises à cette course à la mer.

Ainsi, la II° Armée du général de Castelnau, jusqu’alors installée en Lorraine, fut déplacée vers la Somme ; le 5 octobre fut créée la X° Armée, sous le commandement du général Louis Ernest de Maud’huy[35], envoyée en Picardie (sur une ligne La Bassée-Arras.).

Le général Louis Ernest de Maud'huy.

 

Rappelons que depuis septembre 1914, l’armée belge s’était repliée dans la forteresse d’Anvers, fixant 150 000 Allemands sous les murs de la cité.

Cependant, au début du mois d’octobre, Albert I°, le roi des Belges, se rendit compte que la situation devenait problématique. Ainsi, ce dernier ordonna à ses troupes d’évacuer Anvers le 9 octobre, afin de se retirer à l’ouest, en direction des positions franco-anglaises.

 

Parvenant à faire jonction avec un petit contingent britannique débarqué à Zeebrugge et à Ostende, l’armée belge, forte de 82 000 hommes, s’installa le long de l’Yser sur une ligne Ostende-Nieuport-Dixmude[36] (ils furent bientôt rejoints par les 6 000 fusiliers marins de l’amiral français Pierre Alexis Ronarc’h[37].).

Les fusilliers marins à Dixmude, Le Monde Illustré, N° 3001, 26 juin 1915.

Le corps expéditionnaire britannique, quant à lui, fut envoyé dans la région de Lille, position que les Anglais conservèrent jusqu’à la fin du conflit.

A noter enfin que le détachement de l’Armée de Belgique, contingent français chargé de faire la liaison entre les Belges, au nord, et les Britanniques, au sud, prit le nom de VIII° Armée en novembre 1914.

 

c) La bataille de l’Yser (18 au 30 octobre 1914) : von Falkenhayn, souhaitant plus que jamais s’emparer des ports français sur la Manche, décida secrètement de restructurer la IV° Armée allemande, qui avait participé au front de Lorraine (de nouvelles recrues y furent incorporées, mais ces dernières n’avaient pas l’expérience du terrain.).

La IV° Armée, sous le commandement du kronprinz Albert, fils de Guillaume II, roi de Wurtemberg, attaqua la position belgo-française installée sur l’Yser le 18 octobre 1914.

Albert de Wurtemberg.

 

Grâce à leur supériorité numérique, les Allemands étaient en passe de remporter la bataille de l’Yser, s’établissant sur une ligne Nieuport-Dixmude.

Dévastations en Belgique, près de Dixmude.

Cependant, un éclusier belge proposa au roi Albert I° d’ouvrir les écluses à marée montante, afin d’inonder le champ de bataille. Progressant jusqu’à Nieuport, les Belges profitèrent de la nuit pour ouvrir les écluses de la cité, dans la nuit du 29 au 30 octobre, inondant rapidement la ligne de front[38].

 

Le lendemain, les Allemands furent contraints de mettre un terme à leur offensive. L’inondation de cette ligne de front contraignit les deux belligérants à conserver leurs positions jusqu’en 1918.

 

d) La bataille d’Ypres (29 octobre au 22 novembre 1914) : suite à la bataille de l’Yser, l’hypothèse d’un débordement des alliés par le nord était devenue impossible pour l’Etat-major allemand.

Ainsi, von Falkenhayn décida de lancer une nouvelle offensive à la fin octobre 1914, visant Ypres, cité belge entre les mains des Britanniques.

 

La VI° Armée allemande, bientôt renforcée par la IV° Armée libérée du front de l’Yser, attaqua Ypres dès le 26 octobre 1914.

Jouissant d’une importante supériorité numérique, les Allemands étaient sûrs de leur victoire, d’autant plus que Guillaume II s’était rendu sur place le 27 octobre afin d’assister à l’offensive.

Cependant, les alliés tinrent bon, et le kaiser fut contraint de rejoindre le Luxembourg sans que ses troupes n’aient pu percer la ligne ennemie.

Soldats britanniques sortant des tranchées.

 

Début novembre, les Allemands lancèrent une nouvelle offensive sur Ypres, parvenant à s’emparer de Dixmude le 15 (à quelques kilomètres au nord.).

L’hiver arrivant, les combats diminuèrent progressivement jusqu’à la fin du mois.

 

La bataille d’Ypres, bien que s’achevant sur un statu quo, causa d’importantes pertes aux deux camps : ainsi, les alliés déplorèrent la perte d’environ 120 000 hommes (50 000 tués ou blessés côté français, 20 000 tués ou blessés côté belge, et 50 000 tués ou blessés côté anglais.). Les Allemands, quant à eux, perdirent près de 130 000 soldats (20 000 tués, 80 000 blessés et 30 000 prisonniers.).

Bombardements allemands sur Ypres.

 

d) La fin de la course à la mer (hiver 1914) : l’hiver arrivant, le front se stabilisa, de la mer du Nord à l’Aisne, en passant par la Lorraine et l’Alsace.

Au final, la course à la mer était un échec pour les Allemands, qui n’étaient pas parvenus à percer le front ennemi. Les alliés, quant à eux, trop épuisés pour lancer une contre-attaque massive, furent contraints de s’installer sur leurs positions.

C’est ainsi que peu à peu, les deux belligérants s’installèrent dans des tranchées, afin de se protéger contre les obus ennemis. La guerre de mouvement, qui faisait loi au début du conflit, se transforma à l’hiver 1914 en une terrible guerre de position.

Le front ouest (hiver 1914).

 

e) L’apparition de la tenue bleu horizon (fin 1914 à début 1915) : comme nous l’avons vu plus tôt, les Français étaient toujours équipés du pantalon garance au début de la Grande guerre. Cependant, si l’objectif était d’être facilement repérable par l’artillerie alliée, les Allemands profitèrent de la bonne visibilité de ces pantalons rouges pour faire des ravages dans le camp français.

 

Ces incidents contraignirent l’Etat-major à adopter d’urgence un nouvel uniforme, bénéficiant d’une couleur plus neutre[39]. C’est ainsi que commença la production de la tenue bleu-horizon, qui fut distribuée dans les tranchées entre la fin de l’année 1914 et le début d’année 1915.

A gauche, soldat du 8° bataillon de chasseurs à pieds ; à droite, sous-lieutenant du 166° régiment d'Infanterie, 1915, musée des Invalides, Paris.

 

A noter par ailleurs que la Légion étrangère, les Zouaves et les troupes coloniales (infanterie coloniale, tirailleurs sénégalais, malgaches et indochinois.) ne bénéficièrent pas de la tenue bleu-horizon, mais d’un nouvel uniforme de couleur jaune-moutarde.

Sergent du 3° régiment de zouaves, 1915, musée des Invalides, Paris.

 

            8° La trêve de Noël (fin décembre 1914 à début janvier1915) – Alors que le gouvernement Viviani rentrait à Paris, le 15 décembre 1914, l’heure était au bilan.

Six mois après le déclenchement de la première guerre mondiale, les pertes étaient déjà dramatiques dans les deux camps : 300 000 tués et 600 000 blessés pour les Français (près d’un million d’hommes au total en comptant les troupes belges et anglaises.) ; 675 000 tués ou blessés côté allemand.

La Grande guerre commençait à peine, et pourtant, jamais un conflit n’avait été aussi meurtrier.

 

Alors que les deux belligérants étaient retranchés sur leurs positions, un évènement inhabituel survint au petit matin du 25 décembre 1914.

Ainsi, les troupes franco-anglaises qui tenaient les tranchées autour d’Ypres entendirent des chants de Noël en provenance de la ligne ennemie. Lentement, des centaines de soldats allemands sortirent des tranchées et invitèrent les alliés à les rejoindre.

Les deux belligérants, se rencontrant au milieu d’un paysage totalement dévasté par les obus, fraternisèrent, échangèrent des cadeaux[40] et jouèrent au football.

 

Plusieurs trêves de Noël furent observées sur les lignes où les Allemands faisaient face aux Britanniques, mais pas aux Français.

A noter que d’autres trêves eurent lieu entre 1915 et 1917, mais celles-ci furent bien moins nombreuses ; sur le front est, plusieurs trêves se déroulèrent à Pâques 1915 et 1916.

 

Cependant, ces mouvements d’amitié furent particulièrement mal acceptés par les différentes autorités militaires. Ainsi, les photographies de ces évènements furent détruites[41] ; les soldats « contaminés », quant à eux, furent envoyés en première ligne. Sur le front est, les punitions furent particulièrement dures, ce qui entraîna plusieurs mutineries dans l’armée russe.

 

            9° Le front est (août à décembre 1914) – L’Allemagne ayant déclaré la guerre à la Russie le 1er août 1914, le tsar Nicolas II parvint à mobiliser ses troupes en l’espace de deux semaines[42].

Le tsar Nicolas II.

Ainsi, l’armée russe fut divisée sur deux fronts : l’un fut chargé de marcher vers la Prusse-Orientale, l’autre vers la Galicie, province autrichienne.

 

Cependant, en 1914, les Russes n’étaient pas préparés à une guerre moderne : manque d’armes, problèmes logistiques, artillerie et aviation insuffisantes. Par ailleurs, les détroits turcs étant fermés, les alliés ne purent ravitailler le tsar en armes et en munitions qu’en passant par la mer du Nord[43]

 

a) Victoires et défaites russes en Prusse (août à décembre 1914) : bien que remportant la bataille de Gumbinnen[44] face à une VIII° Armée allemande en infériorité numérique, les Russes multiplièrent les défaites au cours de l’été 1914.

 

Ainsi, le général Paul von Hindenburg[45], renforçant la VIII° Armée, remporta fin août la bataille de Tannenberg[46], malgré l’infériorité numérique de ses troupes ; puis, lors de la bataille des Lacs de Mazurie (15 septembre.), les Allemands repoussèrent  l’ennemi sur la frontière russe.

Le général Hindenburg à Tannenberg.

Suite à ses victoires contre l’armée tsariste, von Hindenburg fut nommé chef d’Etat-major sur le front est par Guillaume II (il fut secondé par Erich Ludendorff[47], général ayant combattu sur le front est.).

Paul von Hindenburg (à gauche) et Erich Ludendorff (à droite), Walter PETERSEN, 1915, Deutsches historisches museum, Berlin.

A noter que la bataille de Lodz (11 novembre au 6 décembre 1914), affrontement à l’issue indécise, stabilisa le front est sur une ligne Varsovie-Cracovie.

Le front est (été 1914).

 

b) Offensive victorieuse russe en Autriche (août à novembre 1914) : cependant, si les Russes avaient été contraints de reculer sur le front prussien, la situation n’était pas la même en Galicie. En effet, l’armée tsariste parvint à remporter plusieurs victoires face aux Autrichiens, moins bien équipés et moins nombreux que les Allemands.

Ainsi, suite à la bataille de Lemberg (fin août.), les Russes s’emparèrent de Lvov début septembre, puis de la Bucovine. Les Autrichiens se replièrent alors dans les Carpates, où le front se stabilisa courant novembre 1914.

 

c) Les Autrichiens en lutte contre la Serbie : les Autrichiens, quant à eux, tentèrent de pénétrer en Serbie à plusieurs reprises (rappelons que la première guerre mondiale avait éclaté en raison de l’assassinat de l’archiduc d’Autriche François Ferdinand à Sarajevo.). Cependant, les Serbes tinrent bon, parvenant le 15 décembre 1914 à reprendre Belgrade aux Autrichiens (qui avaient envahi la ville fin novembre[48].).

 

Enfin, l’Empire ottoman déclara la guerre aux pays de la Triple-Entente le 5 novembre 1914[49] ; cependant, les Turcs ne furent jamais une véritable menace, leur armée n’étant pas suffisamment formée pour prendre part à un conflit d’une telle ampleur.

L'Empire ottoman en 1914.

 

            10° Le théâtre africain (août à décembre 1914) – A l’aube de la Grande guerre, l’Allemagne détenait plusieurs colonies en Afrique : le Togo et le Cameroun, à l’ouest ; le sud-ouest africain allemand[50] ; et l’Afrique orientale allemande[51], à l’est.

 

La question du contrôle des colonies africaines était vitale aussi bien pour l’Allemagne que pour les pays membres de la Triple-Entente. Ainsi, Français et Britanniques envoyèrent des troupes dans cette région du monde afin d’en chasser les Allemands ; cependant, les colonies allemandes, bien équipées et possédant d’importants effectifs militaires, étaient prêtes à riposter.

 

a) Campagne d’Afrique de l’ouest (août à décembre 1914) : le Togo, petite colonie allemande entourée par l’imposante AOF[52], fut la première à tomber entre les mains des troupes franco-britanniques, à la fin août 1914.

 

Suite à la prise du Togo, les troupes alliées purent se diriger vers le Cameroun.

Les Britanniques, attaquant depuis l’est du Nigeria, furent toutefois défaits par l’ennemi, ce dernier profitant d’un terrain accidenté et de voies d’accès de taille réduite.

Les Français, au contraire, pénétrèrent au Cameroun depuis le sud de l’Oubangui et Chari[53], parvenant à prendre Kousseri, au nord-est ; puis, de concert avec un contingent belge venu du Congo, les troupes françaises parvinrent à s’emparer de Victoria[54], sur la côte, à cinquante kilomètres de Douala, la capitale.  

 La campagne du Cameroun.

 

Puis, en septembre 1914, une flotte franco-britannique entreprit le blocus de Douala, contraignant les troupes allemandes à évacuer la cité. Ces dernières se retirèrent alors dans le nord du pays, à Garua. A partir de cette date, les Allemands, en nette infériorité numérique, décidèrent de se lancer dans une guerre de guérilla[55], tentant d’affaiblir l’ennemi autant que possible.

 

b) Campagne d’Afrique du sud-ouest (août à décembre 1914) : contrairement au Cameroun se trouvant en zone tropicale, le sud-ouest africain allemand était une immense région aride.

L’Union d’Afrique du sud[56], dominion[57] britannique, informa Londres qu’elle était en mesure d’envahir seule la colonie allemande.

 

A noter toutefois qu’une partie des Boers, colons sud-africains d’origine allemande, avaient beaucoup de sympathie pour le deuxième Reich. Ainsi, la proposition d’envahir le sud-ouest africain allemand fit scandale au sein du Parlement.

Ainsi, le lieutenant-colonel Manie Maritz[58], à la tête d’une armée sud-africaine stationnée à la frontière, décida de se rebeller, proclamant l’indépendance de l’Afrique du Sud.

Cependant, le gouvernement proclama la loi martiale courant octobre ; à la fin du mois, le lieutenant-colonel Maritz fut vaincu (ce dernier décida alors de se réfugier en Angola.).

 

c) Campagne d’Afrique de l’est (août à décembre 1914) : l’Afrique orientale allemande, vaste territoire à la géographie complexe, composé de massifs montagneux, de régions désertiques, de prairies et de zones forestières, était bordé par trois colonies européennes. Au nord, l’Afrique orientale anglaise ; à l’ouest, le Congo belge ; au sud, le Mozambique (sous contrôle portugais.).

A l’aube du conflit, le Portugal était neutre ; le gouverneur de l’Afrique orientale anglaise, quant à lui, n’avait pas les moyens de prendre part au conflit.

Ainsi, le colonel allemand Paul Emil von Lettow-Vorbeck[59] décida de profiter de cet avantage temporaire pour préparer ses troupes au combat.

Le colonel Paul Emil von Lettow-Vorbeck.

 

Courant août 1914, le colonel Lettow-Vorbeck marcha vers l’ouest, bombardant plusieurs villages du Congo belge ; puis, soutenu par la marine allemande, il fit bombarder le port d’Albertville[60] sur le lac Tanganyika.

En septembre 1914, les Allemands pénétrèrent dans le sud de l’Afrique orientale anglaise, lançant des raids sur les villages de la région (Taveta, Mombasa, etc.), et tentant de s’assurer du contrôle du lac Victoria.

 

Cependant, Lettow-Vorbeck se trouvant tout près de Nairobi, la capitale de l’Afrique orientale anglaise, les Britanniques décidèrent de riposter à l’automne 1914.

Ainsi, ces derniers tentèrent de reprendre le contrôle du lac Victoria ; puis, ces derniers tentèrent d’envahir Tanga, à la frontière entre les deux pays. Cependant, l’offensive fut un échec pour les Anglais, qui tombèrent dans une embuscade début novembre 1914.

Les Britanniques, se repliant dans le désordre, abandonnaient derrière eux des fusils, des mitrailleuses, mais aussi plus de 600 000 munitions dont Lettow-Vorbeck ne se priva pas pour équiper ses troupes.

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[1] Rappelons que les syndicats avaient provoqué d’importantes grèves depuis le début du XX° siècle, souvent matées dans le sang ; le clergé catholique, quant à lui, n’avait guère appréciée la séparation de l’Eglise et de l’Etat en 1905.

[2] Le Carnet B avait été instauré en 1886 (il fut officiellement supprimé en 1947.).

[3] Rappelons que la Triple-Entente était une union défensive regroupant la France, la Russie et l’Angleterre.

[4] Littéralement « paix des forteresses. »

[5] Moltke, né en mai 1848, participa à la guerre contre la France en 1870. Entrant à l’Etat-major en 1906, il était partisan d’une guerre contre la Russie. L’attentat de Sarajevo de juin 1914 lui permit de mettre son plan à exécution.

[6] Dicke Bertha en allemand.

[7] Dubail, né en avril 1851, sortit de Saint Cyr en 1870, lors de la guerre contre la Prusse. Participant à plusieurs combats, il fut fait prisonnier à Metz. Rentrant à Paris suite au conflit, Dubail fut envoyé en Algérie à la tête du I° régiment de Zouaves ; en 1906, il fut nommé général. 

[8] Pau, né en novembre 1848, sortit de Saint Cyr en 1869, participant l’année suivante à la guerre contre la Prusse. Perdant une main au combat, Pau décida néanmoins de rester dans l’armée. Il fut nommé général en 1903.

[9] Cette ligne, malgré de violents combats, resta sensiblement la même jusqu’en 1918.

[10] Castelnau, naquit en décembre 1851 au sein d’une famille aristocratique. Intégrant Saint Cyr en 1869, il participa à la guerre contre la Prusse l’année suivante. Fervent catholique, Castelnau fut écarté quelques temps suite à l’affaire des fiches, au début du XX° siècle (pour en savoir plus à ce sujet, voir le d) 1, section II, chapitre troisième, la troisième république.). Il fut toutefois nommé général en 1906.

[11] Transformée en VI° armée courant août.

[12] Le terme Kronprinz désigne l’héritier de la couronne. A noter que ce mot fut déformé en « con prince » dans les territoires français sous domination allemande.

[13] Lanrezac, né en juillet 1852, intégra Saint Cyr en 1869, participant l’année suivante au conflit contre la Prusse. Participant à plusieurs combats au sein de l’armée de l’Est, Lanrezac fut contraint de se réfugier en Suisse avec ses camarades en raison d’une menace d’encerclement allemande. Envoyé en Tunisie en 1880, il rentra en France cinq années plus tard. En 1906, Lanrezac fut nommé général. A noter que ce dernier était hostile à la théorie de l’offensive à outrance, qu’il jugeait trop coûteuse en hommes.

[14] En anglais British Expeditionary Force.

[15] La bataille des casques d’argent (couleur des casques des cuirassiers allemands abandonnés sur le champ de bataille.) fait référence à la bataille des éperons d’or, affrontement remporté par les Flamands au Moyen âge (les vainqueurs s’étaient emparés des éperons des vaincus.). Pour en savoir plus à ce sujet, cliquez ici.

[16] Langle de Cary était né en juillet 1849 au sein d’une famille noble de Bretagne. Intégrant Saint Cyr en 1867, il participa en 1870 à la guerre contre la Prusse. Grièvement blessé lors d’une bataille, il reçut à cette occasion la Légion d’honneur. Effectuant une carrière banale, Langle de Cary fut nommé général en 1900.

[17] Devenue Charleville-Mézières en 1966, suite à la fusion de cinq communes.

[18] Au mois d’août 1914, l’on estime que près de 5 000 civils (hommes, femmes et enfants.) furent passés par les armes, et que 15 000 maisons furent pillées et incendiées.

[19] French était un militaire anglais né en septembre 1852. Envoyé en Afrique du Sud entre 1899 et 1902, il fut nommé général en 1907, puis maréchal en 1913.

[20] La capitulation fut vivement critiquée par l’Etat-major français car les Allemands s’emparèrent de 400 canons et firent 45 000 prisonniers.

[21] Maunoury, né en décembre 1847, fit ses études à l’école polytechnique. Ayant rejoint l’Artillerie, il participa à la guerre de 1870 contre la Prusse, et fut blessé lors d’une bataille. En 1901, Maunoury fut nommé général.

[22] Von Bülow, né en avril 1846, s’engagea très tôt dans l’armée prussienne. Ainsi, il participa à la guerre contre l’Autriche en 1866, puis au conflit contre la France en 1870.

[23] Von Klück, né en mai 1846, participa aux conflits contre l’Autriche (1866.) et contre la France (1870.). Il fut nommé général en 1906.

[24] A noter que Lanrezac fut limogé le 3 septembre 1914 pour « manque d’esprit offensif. »

[25] Malvy était un avocat né en décembre 1875. A noter que ce dernier, pacifiste, était hostile à la guerre.

[26] Delcassé était un journaliste né en mars 1852. Initié à la franc-maçonnerie en 1886, il fut élu député en 1889. Radical, il occupa entre 1898 et 1905 le ministère des Affaire étrangères.

[27] Millerand était un avocat né en février 1859. Proche des socialistes, il fut élu député en 1888, poste qu’il conserva jusqu’à la fin de la première guerre mondiale. Au début du XX° siècle, il fut nommé ministre à plusieurs reprises, ce qui fut mal accepté par ses camarades socialistes.

[28] Briand était un avocat né en mars 1862. Elu député en 1902, il siégea aux côtés des socialistes. Initiateur de la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat, Briand fut deux fois président du conseil, et plusieurs fois ministre. Cette participation au gouvernement fut vivement critiquée par ses camarades socialistes.

[29] Doumergue était un avocat né en août 1863. Elu député en 1893, il participa à plusieurs ministères entre 1902 et 1910. Il fut président du conseil de décembre 1913 et juin 1914.

[30] Gallieni, né en avril 1849 au sein d’une famille originaire d’Italie, entra en Saint Cyr en 1868. Participant à la guerre contre la Prusse en 1870, il participa à plusieurs batailles ; cependant, blessé et fait prisonnier, il fut envoyé en captivité en Allemagne. Rentrant en France en mars 1871, Gallieni fut envoyé en Afrique, en Martinique, en Indochine et à Madagascar. Promu général en 1899, il fit son retour au pays en 1905. En lice pour le poste de généralissime, il préféra laisser la place au général Joffre en 1911.

[31] Von Hausen, né en décembre 1846, combattit aux côtés du royaume de Saxe, allié de l’Autriche, lors de la guerre austro-prussienne de 1866. Suite à la réunification de l’Allemagne, se rendit à l’école militaire de Berlin afin d’y enseigner ses connaissances.

[32] Né en mai 1856 à Oran, au sein d’une famille légitimiste, Franchet d’Espérey sortit de Saint Cyr en 1876. Par la suite, se dernier fut envoyé en Tunisie, au Tonkin, puis en Chine. Il fut nommé général en 1903. A noter que Franchey d’Espérey avait été nommé commandant de la V° Armée, en remplacement du général Lanrezac, limogé le 3 septembre 1914.

[33] A noter qu’à cette date, près de 150 000 Allemands restaient toujours en Belgique, assiégeant Anvers. L’issue de la bataille de la Marne n’aurait vraisemblablement pas été la même si ces nombreux soldats avaient participé à l’affrontement.

[34] Von Falkenhayn, né en septembre 1861, servit en Chine entre 1896 et 1903, puis rentra en Allemagne. Ministre de la Guerre en 1913, il fut un des partisans de la guerre suite à l’attentat commis à Sarajevo en juin 1914.

[35] Maud’huy naquit à Metz en février 1857, dans une région cédée à l’Allemagne suite à la guerre de 1870. Hanté par la défaite, ce dernier décida d’entrer à Saint Cyr afin de faire carrière dans l’armée.

[36] A noter que le roi Albert I° établit son gouvernement au Havre.

[37] Ronarc’h était un marin né en novembre 1865.

[38] A noter que la plaine avait un niveau inférieur à celui de la mer.

[39] A noter que plusieurs projets concernant la couleur de l’uniforme avaient été mis en place depuis le début du XX° siècle (comme par exemple la tenue réséda, vers 1911, dont la couleur gris-vert fut jugée trop proche de celle de l’uniforme allemand.). Pour en savoir plus à ce sujet, voir le b), 2, section III, chapitre troisième, la troisième république

[40] Souvent du tabac contre de la nourriture.

[41] Seuls les médias anglais relatèrent cette trêve de Noël.

[42] Alors que les Allemands considéraient que les Russes ne seraient pas prêts avant 6 semaines.

[43] A noter que la mer du Nord est gelée six mois dans l’année, rendant impossible les livraisons par bateau.

[44] Gumbinnen est une cité se trouvant à quelques kilomètres de Königsberg (aujourd’hui Kaliningrad.), capitale historique de la Prusse.

[45] Von Hindenburg naquit en octobre 1847 au sein d’une  famille aristocratique. Ce dernier participa à la guerre contre l’Autriche (1866.), puis au conflit contre la France (1870.). Entrant à l’Etat-major en 1881, Hindenburg fut nommé général en 1896. A noter qu’en 1909 il refusa d’entrer au gouvernement en tant que ministre de la Guerre.

[46] Tannenberg (aujourd’hui Stebark.) se situe à quelques dizaines de kilomètres au sud de Königsberg (aujourd’hui Kaliningrad.).

[47] Ludendorff, né en avril 1865, rentra jeune dans l’armée. En 1894, il fut nommé à l’Etat-major, participant à l’élaboration du plan Schlieffen.

[48] A noter que Belgrade fut reprise par les Allemands début octobre 1915, et ne fut libérée qu’à la fin de la guerre.

[49] Rappelons que l’armée ottomane était formée par des officiers allemands ; fusils, munitions et canons étaient de fabrication allemande.

[50] Correspondant à l’actuelle Namibie.

[51] Correspondant aux actuels Etats de Tanzanie, Rwanda et Burundi.

[52] L’Afrique Occidentale française, créée en 1895, regroupait le Sénégal, le Soudan français (actuel Bénin.), la Guinée, et la Côte d’Ivoire.

[53] Actuelle république centrafricaine.

[54] Aujourd’hui Limbe.

[55] La guérilla est une stratégie visant à épuiser l’ennemi. Lorsque ce dernier est en supériorité, les combattants reculent ; cependant, quand l’ennemi est en infériorité, les combattants en profitent pour attaquer.

[56] Actuelle Afrique du sud.

[57] Rappelons que les dominions étaient des Etats libres au sein du Commonwealth, l’Empire britannique.

[58] Maritz était un militaire sud-africain né en 1876.

[59] Lettow-Vorbeck était un militaire allemand né en mars 1870. Rejoignant l’Artillerie, ce dernier fut envoyé en Chine en 1900, puis fut affecté en 1904 au sud-ouest africain allemand. Lettow-Vorbeck se rendit en Afrique orientale allemande en 1913.

[60] Aujourd’hui Kalemie.

 
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