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Les mensonges de l'Histoire


L'édit de Nantes, édit de tolérance

Aujourd'hui, nous connaissons tous le célèbre édit de Nantes, promulgué par Henri IV en 1598, mettant fin à plus d'un demi-siècle de conflits entre catholiques et protestants.

Mais ce texte, souvent présenté comme un édit de tolérance, mettait-il les deux religions sur un pied d'égalité ? Reconnaissait-il vraiment le protestantisme ? Et surtout, comment fut-il accueilli par les principaux belligérants ?

 

Voici la définition que nous donne le Petit Robert (édition 1990) au mot « tolérance » : nom féminin (1361 ; 1561 ; du latin tolerantia). 1. Le fait de tolérer, de ne pas interdire ou exiger, alors qu'on le pourrait ; liberté qui résulte de cette abstention. 2. Attitude qui consiste à admettre chez autrui une manière de penser ou d'agir différente de celle qu'on adopte soi-même. Voir compréhension, indulgence. 3. Histoire religieuse (fin XVI°). Tolérance théologique, ecclésiastique, religieuse, indulgence à l'égard de l'opinion d'autrui sur les points de dogme que l'Eglise ne considère pas comme essentiels. Courant. (1681). Le fait de respecter la liberté d'autrui en matière de religion, d'opinions philosophiques, politiques.

Ainsi, force est de constater que le terme de tolérance est à connotation variable au fil des époques, d'autant qu'il existe d'autres sens au mot « tolérer » : 2. Supporter avec patience (ce que l'on trouve désagréable, injuste). Voir endurer, supporter. 3. (1689). Tolérer quelqu'un, Admettre sa présence à contrecœur. Supporter (quelqu'un) malgré ses défauts.

 

L'édit de Nantes fut promulgué à une époque où la France était troublée par  les guerres de religion depuis près d'un demi-siècle.

A la mort d'Henri III, dernier membre de la dynastie des Valois, la couronne fut cédée à son cousin Henri de Bourbon (le défunt n'avait pas eu d'enfants). Le nouveau souverain, protestant, avait eu une jeunesse turbulente ; cependant, il s'était finalement rapproché d'Henri III, qui souhaitait bénéficier de son aide pour lutter contre la Sainte Ligue[1]. C'est ainsi que les deux hommes assiégèrent Paris, alors entre les mains des catholiques, à l'été 1589.

Procession de la ligue dans l'île de la Cité, par François II BUNEL, fin du XVI° siècle, musée Carnavalet, Paris.

A l'annonce de la mort du roi, Henri IV refusa d'abjurer, mais annonça qu'il protégerait la religion catholique et que le protestantisme serait toléré. Cependant, ce discours ne satisfit pas les différents belligérants, et les ligueurs enfermés dans Paris décidèrent de céder la couronne de France à Charles I°, duc de Bourbon (il s'agissait de l'oncle d'Henri IV).

Charles I°, duc de Bourbon, école française, fin du XVI° siècle, musée Carnavalet, Paris.

Cependant, ce dernier mourut en 1590, laissant la Sainte Ligue au dépourvu. Henri IV décida alors de profiter de la situation, assiégeant à nouveau Paris à l'été 1590. Cependant, le roi de France ne possédant pas de machines de siège, il fut contraint d'organiser un blocus, qui fut finalement percé par les catholiques à l'automne.

Henri IV décida alors de lever le siège, préférant assiéger Chartres (qui ouvrit ses portes en avril 1591), puis Rouen, en novembre de la même année. Cependant, les catholiques parvinrent une fois encore à percer le blocus, en début d'année 1592.

En janvier 1593, les ligueurs décidèrent de réunir les Etats Généraux à Paris, afin de trouver un successeur à Charles X, décédé en 1590. A cette date, Henri IV se retrouvait dans une situation précaire, car si un nouveau souverain était élu, il risquait d'être reconnu par le pape, par l’Espagne catholique, et par les cités encore entre les mains de la Sainte Ligue. C'est ainsi que le roi de France, pressé par ses proches, décida de se convertir au catholicisme, abjurant définitivement le protestantisme en juillet 1593[2].

L'abjuration d'Henri IV, gravure issue de l'ouvrage Histoire de France, par François GUIZOT, France, 1875.

En France, l’annonce de la conversion du roi ne fut pas suffisante pour mettre fin à la guerre, mais de nombreuses cités autrefois proches de la Sainte Ligue décidèrent de faire défection (Aix en Provence, Lyon, Meaux, etc.), considérant qu'il n'y avait plus lieu de se battre, maintenant qu'Henri IV était officiellement catholique.

En mars 1594, le roi de France se dirigea vers Paris une troisième fois, mais fut surpris par le bon accueil que lui réservait la population, lassée de l'intransigeance de la ligue. D'ici l'été, de nombreuses villes se rallièrent à Henri IV, comme Agen, Amiens, Beauvais, Poitiers, Rouen, Sens, Troyes, etc.  

Entrée de Henri IV dans Paris, par François GERARD, XIX° siècle, château de Versailles, Versailles.

 

La Bretagne, dernière région hostile au roi de France, ne fit cependant soumission que quatre années plus tard, en mars 1598.

C'est à cette occasion que Henri IV se rendit à Nantes, au mois d'avril, date à laquelle il promulgua un édit de pacification, intitulé Edit de Nantes en faveur de ceux de la religion prétendue réformée.

L'édit de Nantes, 1598.

Le texte accordait la liberté de conscience à tous les Français, cassant tous les décrets promulgués depuis le règne d'Henri II. Dans la plupart des villes de France, catholiques et protestants étaient à nouveau libres de pratiquer leur culte, mais un seul culte fut autorisé dans certaines cités : le catholicisme à Paris, Rouen, Lyon, Dijon, Toulouse, etc. ; et le protestantisme à La Rochelle, Montpellier, Montauban, Sedan, etc.

Par ailleurs, afin de garantir l’application de ces libertés, Henri IV accorda aux protestants 150 lieux de refuges environ, dont 51 places de sûreté (La Rochelle, Montpellier, Nîmes, Alès, etc.), chacune pouvant être défendue par une armée de 30 000 soldats (ce qui entraina immanquablement la constitution d'un véritable Etat dans l'Etat).

 

De nos jours, l’on considère l’édit de Nantes comme un texte ayant fait l’unanimité de par sa grande tolérance. Cependant, s'il accordait de nombreuses places fortes aux protestants et autorisait le libre exercice du culte, le protestantisme était toujours considérée comme une « religion prétendue réformée. »

Ainsi, les seigneurs convertis au protestantisme pouvaient exercer leur culte dans leurs domaine (articles VII), mais si les protestants étaient partout tolérés, il ne pouvaient faire exercice de leur religion que dans certaines villes (article IX). Cependant, outre les villes exclusivement catholiques que nous avons énoncées plus haut, l'exercice du protestantisme était interdit à la Cour et dans les armées du roi (articles XIV et XV). La publication d'ouvrages protestants dans les villes catholiques était donc interdit (article XXI). Par ailleurs, les protestants étaient tenus de respecter les jours de fête catholiques (article XX), mais aussi de s'acquitter de la dîme, qui était un impôt versé à l'Eglise, correspondant à un dixième des récoltes (article XXV). A noter enfin qu'aucune clause ne concernait le judaïsme ou l'islam, religions alors considérées comme mineures.

En raison de ces clauses restrictives, qui répondaient à un impératif politique en cette fin de XVI° siècle, mais totalement désuètes aujourd'hui, l'on ne peut décemment pas parler de « modèle de tolérance » à propos de l'édit de Nantes.

 

D'autant que ce texte n'était pas particulièrement différents des précédents accords de paix précaires signés lors des précédentes guerres de religion, qui prévoyaient déjà à l'époque la liberté religieuse et la concession de places fortes aux protestants. Ainsi, tout comme les précédents traités entre catholiques et protestants, l'édit de Nantes rencontra une fois encore l'opposition des deux camps.

Cependant, il convient de préciser qu'en 1598, après 50 années de guerres, le nombre de protestants avait particulièrement chuté. Par ailleurs, autant les seigneurs convertis au protestantisme profitèrent de la minorité des enfants de Catherine de Médicis[3] pour fomenter des troubles ; autant en 1598, le nouveau roi n'avait rien d'un faible[4]. 

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[1] Les premières ligues catholiques commencèrent à faire leur apparition vers 1576, à l'issue de la cinquième guerre de religion, qui s'acheva sur un traité très favorable aux protestants (liberté de culte, indemnisation des victimes du massacre de la Saint Barthelémy, création de cimetières protestants, etc.). Henri III, qui souhaitait se débarrasser de la Sainte Ligue, parvint à la faire interdire en 1577, mais cette dernière refit son apparition à la mort du frère cadet du roi, faisant d'Henri de Bourbon l'héritier de la couronne. Pour en savoir plus à ce sujet, cliquez ici.

[2] A cette occasion, Henri IV aurait dit : Paris vaut bien une messe ! Mais cette citation, prouvant que cette abjuration n'obéissait qu'à un calcul politique, est peut-être apocryphe.

[3] Catherine de Médicis, veuve d'Henri II en 1559, eut plusieurs enfants qui se succédèrent sur le trône de France, mais moururent trop jeunes pour avoir une quelconque autorité : François II (1559 à 1560), Charles IX (1560 à 1574), et Henri III (1574 à 1589).

[4] Néanmoins, de nouveaux troubles furent fomentés par les protestants en 1620, qui furent définitivement vaincus en 1629, suite au siège de La Rochelle. Louis XIII décida alors de supprimer les clauses militaires de l'édit de Nantes, mettant un terme à ce dangereux « Etat dans l'Etat. »

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